Les femmes ministres, l’une des grandes déceptions du gouvernement Sellal

182642-algerie-passation-de-consignes-a-l-environnement-coudees-franches

Le gouvernement Sellal III, nommé au début du quatrième mandat du président Bouteflika, avait créé la surprise avec la présence de pas moins de sept femmes ministres dans ses rangs. La décision avait été présentée comme une avancée considérable dans la représentation de la femme en politique algérienne. Au-delà du coup de pub qu’a pu représenter cette annonce notamment auprès des partenaires étrangers de l’Algérie -sensibles à ce genre de détails-, il semble important d’examiner les bilans de ces femmes ministres, sept mois après leur prise de fonction. Et il est loin d’être satisfaisant.

Depuis sa nomination, la ministre de l’Environnement, Dalila Boudjemaa, a été transparente. Et ses rares prises de position l’ont desservie. Elle s’est notamment attirée les critiques pour sa position concernant l’exploitation du gaz de schiste. Dans une attitude qui peut être qualifiée de complaisante, la ministre a rejoint la position des partisans de l’exploitation des gaz non conventionnels sur le fait que la fracturation hydraulique ne présente aucun danger pour l’environnement. Cette position va pourtant à l’encontre des nombreuses études prouvant les dangers d’une telle activité. La ministre a en outre failli en n’exigeant pas des études plus approfondies sur les potentielles répercussions environnementales que causerait l’exploitation du gaz de schiste dans la région.

La ministre de l’Education Nationale Nouria Benghebrit semble bien partie pour effectuer un travail efficace dans le but de corriger les erreurs de son prédécesseur, à condition de ne plus se laisser distraire dans sa mission. En ordonnant l’ouverture d’une enquête après que des élèves aient dansé le « Way Way » dans une école, la ministre focalise les ressources de son ministère sur une affaire bénigne et insignifiante, en prenant le risque de se détourner de sa mission de redressement de l’éducation nationale.

La ministre de la Poste et des TIC Zohra Derdouri avait créé la confusion quant à sa position concernant l’ouverture du capital d’Algérie Télécom. D’abord contre l’entrée de l’opérateur français Orange dans le capital, la ministre a arrondi les angles en novembre dernier en déclarant « ne pas être fermée à la discussion ».Plus gênant encore, l’expert en technologies de l’information et de la communication Ali Kahlane a déclaré, lors d’un entretien en décembre dernier sur Radio M, que « Le Ministère de la Poste et des Technologies de l’Information et de la Communication de Zohra Derdouri ne sert à rien, à part être un facteur bloquant dans l’évolution de l’écosystème des TIC en Algérie. » Une position qui semble être partagée dans le secteur et qui se révèle problématique pour celle qui est placée en tête des femmes les plus puissantes d’Algérie par Forbes.

Appelée pour remplacer Khalida Toumi, qui a occupé le poste pendant 12 ans, la ministre de la Culture Nadia Labidi semble plus effacée que son prédécesseur, moins présente sur la scène médiatique. Cinéaste de profession, la ministre a par ailleurs déçu par son ambiguïté lors de la polémique entourant le film l’Oranais. Tout en annonçant que le film ne serait pas interdit, elle s’est tout de même refusée d’apporter clairement son soutien à la liberté de création artistique du film.

Nouria Yamina Zerhouni, la ministre du Tourisme, n’a pas réussi à se distinguer de ses prédécesseurs. La ministre a simplement réitéré les usuelles déclarations au sujet du manque d’infrastructures et la mauvaise formation du personnel, tout en promettant que son ministère y remédierait. Des promesses récurrentes sans résultats, depuis les vingt dernières années. La ministre ne semble avoir ni vision, ni stratégie pour développer le tourisme. L’été dernier, elle avait brillé par son absence dans le dossier des retards d’Air Algérie qui avait pénalisé des dizaines de milliers de personnes venus passer leurs vacances au pays.

Aïcha Tagabou, benjamine du gouvernement, est probablement la ministre la moins bien lotie du gouvernement. Originaire de Tamanrasset, elle est chargée de l’artisanat, un secteur en voie de disparition. La tâche de revigorer le secteur artisanal qui lui a été confiée semble titanesque et probablement vouée à l’échec, ce, peu importe à qui la tâche aurait été confiée.

Emouvante lors d’une intervention télévisée sur Ennahar TV en juillet dernier, au sujet des enfants victimes à Gaza, la ministre de la Solidarité, de la Famille et de la condition de la Femme, Mounia Meslem, n’a cependant pas réussi à porter un projet pour mieux protéger les femmes des violences sexuelles. L’Algérie a encore beaucoup de chemin à faire en la matière, selon les ONG.

 Certes, le bilan de la majorité des ministres hommes est tout aussi peu reluisant que celui des ministres femmes. Mais c’est justement parce que le statut de la femme en politique est aussi fragile en Algérie, qu’il y a une obligation morale pour les actuelles femmes ministres de se surpasser et présenter un bilan irréprochable, afin de ne pas alimenter les amalgames et prouver que la femme algérienne a un rôle crucial à jouer en politique.


Pour commenter nos articles, rendez-vous sur notre page Facebook,
en cliquant ici