Situation politique : « Le FFS est lâché des deux côtés, le MSP a fait un sale coup à la CNLTD »

grim

Rachid Grim est politologue. Il revient dans un entretien à TSA sur l’actualité politique récente en Algérie.

 Que motive selon vous la décision du MSP de lancer des consultations avec le pouvoir et l’opposition ?

 Le MSP ne s’est pas décidé totalement à être dans l’opposition ou près du pouvoir. Mokri a sorti le parti de l’alliance présidentielle, mais on sent que le MSP ne veut pas quitter totalement le pouvoir. Le MSP se situe dans l’opposition tout en restant accroché au pouvoir et à l’alliance. Il a fait un sale coup à la CNLTD car il est quand même une partie importante de la coordination. On sent que le parti veut reprendre du poil de la bête en disant « Je suis important dans l’opposition mais je ne veux pas décrocher du pouvoir ».

Cette situation est-elle tenable pour le MSP ?

 Il y a une opposition à l’intérieur du parti entre ceux comme Mokri qui disent « Je suis dans l’opposition ferme » et ceux comme Aboudjerra Soltani qui disent « Je suis accroché au pouvoir ». Le parti balance entre l’un et l’autre. Le MSP lui-même n’a pas encore réglé ce problème fondamentalement, soit être dans l’opposition avec les contraintes qui s’imposent, ou être accroché au pouvoir avec tous les avantages. Ce sont deux lignes totalement différentes.

Le pouvoir a-t-il besoin selon vous du MSP ?

Totalement. Le pouvoir a besoin d’un parti islamiste « modéré » assez puissant pour avoir un meilleur ancrage dans la population. Qu’on le veuille ou pas le MSP représente une force politique importante. Amar Ghoul avec son parti TAJ n’arrive pas à prendre cette place.

La décision du MSP remet-elle en cause selon vous l’existence de la CNLTD ?

Elle ne remet pas en cause son existence, mais elle l’affaiblit très fortement. Il faut reconnaitre que le MSP est l’un des partis les plus importants de cette coordination avec le RCD. Si la coordination perd un élément aussi important, effectivement ça l’affaiblirait sérieusement.

Le FLN et le RND ont posé de nouvelles conditions à leur participation à la réunion du Consensus national initiée par le FFS…

 Le FFS a fait preuve d’une naïveté extraordinaire. Je ne sais pas comment il a pu s’engager sur cette voie. Maintenant il est lâché des deux côtés. Il va être lâché d’une manière ou d’une autre aussi bien par le FLN que par le RND. Le FFS va se retrouver tout seul et ne pourra plus discuter qu’avec lui-même.

On sent l’absence d’Aït Ahmed, qui ne serait jamais entré dans cette logique s’il avait toujours ses capacités physiques et n’était pas malade. Là c’est la nouvelle direction du FFS. Même si l’objectif n’est pas clair, le but était de marginaliser totalement le FFS, et c’est le cas.

Comment le FFS peut se remettre de cette situation ?

 Le FFS ne se remettra pas de ça, du moins pas tout de suite. Cette situation démontre que le FFS n’a plus de stratégie d’opposition. Cette situation ne date d’ailleurs pas de 2015, mais depuis les élections législatives de 2012. On sent que le FFS commence à perdre de son ancrage populaire, de son ancrage d’opposition, aussi bien en Kabylie qu’ailleurs.

Le FFS tend lui-même à devenir un appendice du pouvoir. C’est là qu’on voit que c’est depuis qu’Ait Ahmed a quitté la présidence du parti que ça tourne dans ce sens. Ait Ahmed avait un projet et une vision d’opposition, tandis que le FFS d’aujourd’hui n’a plus cet ancrage oppositionnel définitif. Le FFS ne représente plus ça, aujourd’hui il ne reste rien.


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