Réduction des importations. Pourquoi le gouvernement Sellal ne dispose d’aucune marge de manœuvre

Port - Alger

Lors du Conseil ministériel restreint qu’il a présidé, mardi 23 décembre, le président Bouteflika avait chargé le gouvernement de veiller à la rationalisation des importations du pays. Une mesure décidée en réponse à la chute du cours du pétrole. Et en effet, le poids du coût des importations ne cesse d’augmenter, dépassant bientôt la barre des 60 milliards de dollars. L’Algérie doit donc trouver des solutions.

Mais a-t-elle concrètement les moyens de réduire ses importations ?

Comme en 2009, le gouvernement algérien pourrait être tenté de réguler les importations par des mesures administratives. Mais cette option est vouée à l’échec. En effet, des mesures prises par la Loi de finances complémentaires de 2009, notamment la mise en place du crédit documentaire, avaient déjà eu pour but de tenter de diminuer les importations. Celles-ci ont échoué, les importations ont continué à augmenter ces cinq dernières années. Pire : le gouvernement a même fait machine arrière en réintroduisant, dans la Loi de finances 2014, la remise documentaire comme second moyen de paiement des importations de produits finis.

Les accords internationaux

Le gouvernement algérien pourrait aussi être tenté de tout simplement restreindre certaines importations, comme le suggèrent indirectement certains responsables. Mais une telle mesure serait tout simplement impossible. L’Algérie est signataire de l’Article 8 des statuts du FMI qui stipule qu’aucun État-membre ne peut imposer « des restrictions à la réalisation de paiements et transferts afférents à des transactions internationales courantes ». Comprendre : l’Algérie est dans l’obligation d’autoriser toutes les importations si elles remplissent les critères. Aller à l’encontre des règles d’une institution internationale comme le FMI serait suicidaire, et ferait courir à l’Algérie le risque de sanctions internationales.

Troisième option : augmenter les droits de douanes. Là encore, c’est impossible. L’Algérie a signé des accords avec l’Union européenne et négocie actuellement son adhésion à l’OMC. Sans compter l’accord dans le cadre la Zale (Zone arabe de libre-échange). Des accords qui rendent toute augmentation des tarifs douaniers impossible.

Les mesures « techniques »

Ces trois options étant exclues, restent les mesures « techniques ». La première a d’ailleurs été prise début décembre, bien avant la réunion de mardi. La Banque d’Algérie a en effet redéfini le niveau autorisé des engagements extérieurs par signature des banques et établissements financiers au titre des opérations d’importation, baissant le plafond de quatre à deux fois leurs fonds propres. La capacité des banques à financer le commerce extérieur est ainsi réduite. L’impact n’est pas certain. Il faut attendre plusieurs mois pour voir si la mesure a servi à réduire les importations.

Autre mesure qui pourrait avoir un impact : le gouvernement algérien pourrait augmenter la TVA sur les produits importés et baisser celle sur les produits locaux. Ce serait une décision courageuse, et contribuerait à n’en pas douter à la réduction des importations. Cependant, le gouvernement se heurterait au très puissant lobby des importateurs, et il se retrouvera probablement obligé à faire machine arrière. On a vu la capacité du gouvernement à faire face aux importateurs dans le dossier des importations de véhicules.

Troisième option : la chasse aux surfacturations. En regardant de plus près les importations de l’Algérie, un premier constat se précise. Tandis que le volume de certains produits n’augmente pas, leur prix augmente. Bien qu’il soit possible que l’Algérie n’achète pas les produits au meilleur moment, expliquant ainsi des prix plus élevés, l’hypothèse la plus probable est qu’il y a de plus en plus de cas de surfacturation. Mais la démarche n’est pas aisée : l’État algérien n’est pas outillé pour suivre les évolutions des marchés internationaux de produits et de matières premières.

Quatrième option : déprécier fortement le dinar pour rendre les produits importés plus chers. Mais le risque d’une telle décision est important. Elle risque de produire de l’inflation, nocive pour l’économie, et provoquer des troubles sociaux, qui menaceraient la survie du pouvoir en place.

En conclusion, malgré la consigne du président de la République de veiller à la rationalisation des importations, le gouvernement ne dispose quasiment d’aucune marge de manœuvre. D’autant plus que l’Algérie reste dépendante des importateurs pour s’approvisionner de certains produits de base. Dans ce contexte, la seule solution pour se défaire du poids des importations serait d’encourager la production nationale.


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