C’est du jamais vu dans l’histoire des règlements de comptes politiques au sommet du pouvoir algérien. Ce mardi 26 août, Abdelaziz Belkhadem a été humilié. L’homme qui a traversé toutes les tempêtes politiques depuis octobre 1988 – seul le général Toufik a réussi le même exploit – a été humilié. Le même jour, il perd son poste de ministre d’État-conseiller du président et toutes ses fonctions au sein du FLN. Longtemps au cœur du pouvoir, Belkhadem est aujourd’hui indésirable. Il est banni.
Que s’est-il passé ? Qu’est ce qui a pu motiver la décision du président Bouteflika qui vient de signer la mort politique d’un homme qui lui est resté fidèle, y compris dans les moments les plus difficiles ? Abdelaziz Belkhadem a-t-il trahi ?
Une chose est sûre : Abdelaziz Belkhadem a eu le châtiment réservé à quelqu’un qui aurait gravement fauté. Ainsi, le Président ne s’est pas contenté de le limoger de son poste à la présidence. Il a donné instruction pour que toutes ses activités en relation avec l’ensemble des structures de l’État soit gelées.
Ce n’est pas tout. Bouteflika a demandé à Amar Saâdani, secrétaire général du parti du Front de libération nationale (FLN), d’exclure Belkhadem, qui est membre du Comité central, du FLN. Les choses n’ont pas été faites dans la discrétion, comme c’est souvent l’usage au sommet de l’État. L’information a été rendue publique, à travers la très officielle agence de presse APS. Visiblement, le Président a voulu que tout le monde sache qui a décidé l’exclusion de Belkhadem du FLN.
Le message, sous forme d’avertissement, est d’abord adressé aux soutiens de Belkhadem au sein du parti. Les frondeurs dirigés par Abderrahmane Belayat, ancien coordinateur du parti, ont tenté de perturber la dernière réunion du Comité central tenue le 21 juin à l’Aurassi, pour imposer une candidature de Belkhadem au poste de secrétaire général du parti.
Depuis quelques mois, Abdelaziz Belkhadem ne cache pas ses ambitions politiques. L’homme veut devenir président et il compte s’appuyer sur le FLN. Une ambition qui s’est accentuée avec la maladie du Président. « Avant la dernière élection, Belkhadem s’est entouré d’hommes d’affaires dans la perspective de financer sa campagne pour la présidentielle. Il était convaincu que le Président n’était pas en mesure de faire un autre mandat », confirme un de ses proches. Il a fini par se ranger derrière le candidat Bouteflika. À contrecœur. Sa désignation au poste de ministre d’État-conseiller du président ne l’a pas calmé. Il ne respecte pas son devoir de réserve, exigé par son poste et s’implique directement dans la crise du FLN.
Le 18 juillet, sur la chaine Al Biled TV, Abdelaziz Belkhadem affirme avoir reçu le soutien du Président pour l’élection d’un nouveau secrétaire général du FLN. « Des mensonges », réplique la direction du FLN. L’audace de Belkhadem ne plait pas au Président. Mécontent, Bouteflika boude presque son ministre d’État. Depuis sa désignation, Belkhadem est isolé. Il n’a effectué d’ailleurs aucune mission officielle à l’étranger.
Belkhadem ne se contente pas de s’impliquer dans la crise du FLN. Il devient de plus en plus incontrôlable. Cette semaine, contrairement à Ouyahia qui a décliné l’invitation, il s’est rendu à l’université d’été du Front de changement organisée autour « de la transition politique en Algérie ». Les intervenants n’ont pas ménagé le pouvoir qualifié « d’illégitime ». Puis sur la chaîne de télévision Ennahar TV, il dénonce les régimes arabes, notamment le pouvoir en Égypte, pour leur position sur le conflit à Gaza.