La Banque d’Algérie : institution indépendante ou téléguidée ?

banque algérie

Les textes de loi et les statuts sont clairs : la Banque d’Algérie est une institution indépendante. Le Premier ministre, Abdelmalek Sellal en personne, le rappelait récemment. Cela dit, il est bien connu qu’il existe un fossé entre la théorie et la pratique en Algérie. Qu’en est-il réellement de l’autonomie et de la liberté d’action de l’institution monétaire nationale ?

Deux bruyants scandales, un silence assourdissant

Le monde de la finance a été ébranlé suite aux révélations du journal Le Monde, dimanche 8 février, sur l’existence d’un réseau mondial d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent d’un total de 180 milliards d’euros, au centre duquel se trouve la filiale suisse du géant bancaire mondial HSBC. L’affaire « Swissleaks » nous apprend que 440 personnes liées à l’Algérie, dont 44 ont la nationalité, détiennent des comptes en Suisse, avec des avoirs cumulés estimés à plus de 671 millions de dollars. Ce scandale qui a fait réagir les gouvernements de nombreux pays concernés, n’a provoqué aucune réaction officielle des autorités algériennes. Ni les ministres, ni la Banque d’Algérie ne se sont exprimés sur le sujet.

Par ailleurs, les Douanes algériennes rapportaient récemment qu’une banque à capitaux étrangers, présente en Algérie, s’était rendue coupable du transfert illicite de 400 millions d’euros dans le cadre de ses activités de commerce extérieur. Une infraction gravissime qui porte préjudice à l’économie nationale. Pourtant, là encore, aucune réaction officielle des autorités.

Sur ces deux dossiers, la Banque d’Algérie est en première ligne, en tant que garante de la réglementation des changes, du contrôle des transferts en devises et du contrôle a posteriori des opérations de commerce extérieur.

Une réglementation « à la tête du client »

Par contre, la Banque d’Algérie et d’autres institutions, font semblant de ne pas voir certaines violations de la réglementation, qui se déroulent pourtant au vu et au su de tous. Quid du « Square Port Saïd », bureau de change sauvage en plein cœur d’Alger, « aux portes » d’institutions symboliques comme le Parlement ou… la Banque d’Algérie ?

Sachant se montrer strictes avec les citoyens lambda qui font sortir des devises du pays , pour des vacances ou des études à l’étranger par exemple, ou avec certaines entreprises exportatrices pour le rapatriement des devises, les institutions en charge de faire respecter la réglementation (comme la Douane et la Banque d’Algérie) se montrent laxistes et magnanimes avec les grands fraudeurs, les importateurs qui surfacturent et certaines personnes proches du pouvoir.

Comment expliquer autrement que des individus puissent acheter des biens immobiliers valant plusieurs centaines de milliers d’euros hors du territoire national, alors que le commun des Algériens n’a droit qu’à l’équivalent de 15 000 dinars d’allocation touristique annuelle. Cette aberration crée une inégalité entre les Algériens : ceux dont on tolère les fraudes, pour des raisons obscures, d’une part et ceux à qui la loi s’applique dans toute sa rigueur, d’autre part.

Enfin, il semble donc légitime de se demander si la Banque d’Algérie est réellement indépendante. Le « deux poids, deux mesures » observé dans l’application de la réglementation tend à illustrer le fait que cette institution répond à des injonctions politiques, son action étant limitée aux questions secondaires et muselée dès lors qu’il s’agit de dossiers « sensibles ».


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