Les Tunisiens aux urnes pour élire leur président

drapeau tunisien

Pour la première fois de son histoire, la Tunisie connaît une présidentielle à deux tours. Ce dimanche 21 décembre, plus de cinq millions d’électeurs sont invités à choisir entre le président sortant, Moncef Marzouki (33,5% au premier tour), et l’ancien Premier ministre de transition, Béji Caïd Essebsi (39,5%). L’écart de six points entre les deux rivaux et la virulence de la campagne d’entre-deux tours rendent l’issue du vote incertaine. Mais quel qu’en soit le vainqueur, il sera confronté à trois défis majeurs à relever dans les cinq ans à venir.

Former un gouvernement stable

Le second tour de la présidentielle tunisienne vient clore un processus électoral commencé fin octobre avec les législatives. La coalition Nida Tounes est arrivée en tête avec 86 députés, suivie des islamistes d’Ennahda (69), l’UPL (16), le Front populaire (15) et Afek Tounes (8). D’autres partis gagnent une poignée de sièges, mais insuffisamment pour peser sur la formation du nouveau gouvernement. Quant à Nida Tounes, elle remporte une majorité relative, mais non absolue. Autrement dit : elle est obligée de s’allier à d’autres formations pour former un gouvernement. Coalition davantage que parti, le mouvement de Béji Caïd Essebsi est composé de courants idéologiques hétérogènes. Officiellement, tous s’accordent à s’opposer à Ennahda, ce qui a valu à Nida le qualificatif de « coalition laïque. » En coulisses pourtant, certains plaident pour un pacte de gouvernance avec le parti de Rached Ghannouchi pour obtenir la majorité la plus large possible au Parlement. L’un des premiers défis du nouveau président sera de rassembler tous les acteurs autour de la table pour former un gouvernement stable pour les cinq ans à venir.

Reconstruire une économie fragilisée

Tourisme en perte de vitesse, chômage endémique, dinar tunisien en chute libre, inflation, déficit commercial qui dérape… C’est peu dire que l’économie tunisienne souffre depuis trois ans. Le prochain président et son gouvernement devront composer avec des marges de manœuvres limitées d’un point de vue financier, et une situation sociale explosive. Il y a quelques jours, le cri d’alarme est venu du président de la commission des finances de l’Assemblée, qui  a mis en garde contre « l’endettement record » de la Tunisie. Ce dernier aurait dépassé les 50% du PIB. Il y a urgence à trouver de nouvelles recettes fiscales. D’où l’entrée en vigueur, à la fin de l’été, de la « taxe de solidarité », une contribution de 30 DT (15 euros) dont doivent désormais s’acquitter les voyageurs au moment de quitter le sol tunisien. Les Algériens en sont exonérés. Le projet de loi de finances 2015 va plus loin en supprimant certains avantages fiscaux. En créant aussi de nouveaux impôts qui devraient se traduire, dès janvier, par la hausse des prix de certains produits ou services. Ce sera au président élu dimanche d’en assumer les conséquences.

Contenir la menace sécuritaire

« Les menaces de Daesh ne perturberont pas le cours de l’élection » a promis le président de l’ISIE, l’instance indépendance qui organise le scrutin. Ce dimanche, comme pour les précédents rendez-vous électoraux, la sécurité a été renforcée. Dans les gouvernorats sensibles, ceux proches de la frontière algérienne, 124 bureaux de vote – plus du double du premier tour – feront l’objet d’horaires aménagés. C’est que cette fois encore, les terroristes promettent de perturber le déroulement de l’élection. Quelques jours avant le second tour, des terroristes tunisiens affiliés à l’État islamique ont appelé au boycott du scrutin et au jihad dans leur pays d’origine dans une vidéo diffusée sur Internet. Les mêmes extrémistes revendiquent l’assassinat, en 2013, de deux opposants politiques, Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. La menace peut aussi venir de la frontière libyenne, à 10 kilomètres de laquelle des combats acharnés ont eu lieu ces dernières semaines. Rétablir la stabilité et la sécurité est sans doute le plus grand enjeu du prochain quinquennat. À défaut, le prochain président aura du mal à relever les défis économique et politique.


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