Guerre contre Daech : témoignage d’une journaliste algérienne de retour d’Irak

Zineb Ben Zita (1)

Zineb Ben Zita est journaliste à Echourouk News TV depuis une année. Elle vient de rentrer d’Irak, où elle s’est rendue pour travailler sur la situation chaotique dans plusieurs régions du pays, menacées par Daech.

Vous venez de revenir d’Irak où vous avez passé un mois…

Je suis partie en Irak le 15 octobre et je suis rentrée le 15 novembre. Je tenais à partir dans ce pays car l’information qui nous est communiquée sur l’Irak nous parvient  souvent d’agences de presse qui ne sont pas sur place, ou par le biais de vidéos tournées par l’armée irakienne ce qui  n’est pas toujours fiable. Je voulais donc m’y rendre pour  mener ma propre enquête, voir de mes propres yeux l’image de l’Irak et fournir une information aux téléspectateurs algériens.

Parlez-nous du travail que vous avez effectué…

J’ai consacré la première semaine à comprendre la composante de la société irakienne.  J’ai été très surprise de voir que les Sunnites et les Chiites cohabitent normalement. J’ai été très bien accueillie, partout où je suis allée. J’ai été invitée dans des familles mixtes,  où la femme est Sunnite et le mari Chiite. Les deux communautés vivent ensemble, contrairement à l’image qu’on a de l’extérieur. L’image qui est vendue par la plupart des médias est fausse. Il est vrai qu’il existe des extrémistes des deux côtés, mais je pense que la divergence existe au niveau de la classe politique.

J’ai pu, par la suite, rencontrer des politiciens. J’ai été la première journaliste à interviewer Nouri El Malki, Premier ministre irakien, après son départ du gouvernement. Je me suis, également, déplacée avec l’armée irakienne et les milices lors de leurs opérations contre Daech. J’ai été la première journaliste à me rendre à Amriyat El Felloudj après la bataille qui s’y est déroulée contre le groupe terroriste de l’Etat Islamique. J’ai fait le tour de plusieurs autres villes, dont Baïji, la plus grande ville reprise à Daech par l’armée irakienne. J’étais à quelques kilomètres de zones contrôlées par le groupe terroriste.

L’armée et les milices ont-elles facilement accepté votre présence ?

Avoir l’accord de l’armée a été très difficile. Personne ne voulait prendre la responsabilité. Je suis journaliste et femme. Le patron des opérations de Bagdad, qui chapote les interventions militaires, m’a dit que pour une femme c’est difficile, mais j’ai insisté. Cela m’a pris une semaine de négociations.

 Le groupe terroriste de l’Etat islamiste Daech est-il aussi présent en Irak que ce qui  se dit dans les médias ?

Oui. Daech a vraiment pris de l’ampleur. Les habitants de Bagdad vivent le calvaire. C’est l’insécurité totale. Il y a plein d’attentats chaque jour. J’ai plusieurs témoignages de familles, qui occupaient des villages à quelques kilomètres de Bagdad.  En plus de tout cela, le groupe terroriste utilise la guerre médiatique. Les habitants ont tellement peur. Certains  ont délaissé leurs maisons, même si Daech n’était pas encore arrivé dans leurs régions. J’ai rencontré des victimes du groupe terroriste, dont, des membres des tribus d’Abou Nimr dans la région d’El Ambar où Deach a tué une centaine de personnes. Les membres de ces tribus ont fui leurs terres et ils sont dans des camps de réfugiés. C’était très difficile de les convaincre de parler devant la caméra.

Vous avez passé du temps avec l’armée et les milices. Dans quel état d’esprit sont-elles ?

J’ai passé quinze jours avec les milices et l’armée. Elles sont vraiment optimistes et sûres qu’elles vaincront Daech. Á chaque victoire elles font la fête toute la nuit.

Avez-vous eu, à un moment, peur de Daech?

Un soir j’ai eu vraiment peur. Des hommes de Daech étaient à une centaine de mètres de nous. L’armée irakienne a nettoyé une zone près d’un territoire qu’occupe le groupe terroriste. Ils ont déminé deux maisons pour héberger les patrons de l’armée et j’étais avec eux. Les membres du groupe terroriste se sont attaqués à nous. Après plus de deux heures d’accrochage, des hélicoptères ont bombardé le site et nous avons pu être sauvés.


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