L’histoire et la commémoration

drapeau-algerien-noir-et-blanc

Tous les peuples ont besoin d’un récit collectif qui les entraîne vers un objectif commun. L’histoire est un travail scientifique qui permet à chacun de s’approprier une part du récit national. La commémoration est la mise en scène officielle de l’histoire. Partout de tous temps, les responsables politiques s’approprient l’histoire, parfois ils la dénaturent en fonction de leurs intérêts.

Écrire et raconter

En Algérie, le témoignage des acteurs qui ont participé à la Guerre d’indépendance est un exercice récent. Et comme tout témoignage, il est partiel, voire partial. Chacun raconte sa vérité. Toutefois, cela constitue un bon point de départ pour les historiens. Le scientifique, lui, est contraint de recueillir des témoignages et de les confronter aux faits pour s’assurer que l’un et l’autre sont conformes. C’est dans la combinaison de ces facteurs que l’on compose un roman national et non dans le verbiage des bureaucrates qui servent l’histoire officielle.

Moudjahidine business

Le statut de l’histoire en Algérie est paradoxal, dans ce sens où elle sert à légitimer un régime en place et non à construire une mémoire collective. Il y a, d’un côté, la légende, la mythologie nationale, consacrée et portée par une partie des élites-clientèles du pouvoir en place. Et de l’autre, des historiens dont le travail consiste à replacer dans le contexte de l’époque les faits et leurs acteurs.

Pourquoi cette passion pour l’histoire-souvenir, plutôt que pour l’histoire-recherche ? Il me semble que l’alchimie qui s’est fondue dans la mémoire collective des Algériens a provoqué une confusion entre la mythologie nationale et l’Histoire. Cela a conduit à une captation de cet héritage collectif par quelques uns qui l’ont transformé en histoire-business. Aujourd’hui entendre le ministre des Moudjahidine réclamer un ministère de « souveraineté historique » revient à vouloir définitivement confisquer le récit national au profit d’un petit groupe qui devient de facto le dépositaire et  le narrateur de notre Histoire, avec les inévitables dérives que cela provoque.


Pour commenter nos articles, rendez-vous sur notre page Facebook,
en cliquant ici