Soldes : bonne affaire ou arnaque ?

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Des remises qui peuvent aller jusqu’à 80%, des promotions, des vitrines tape-à-l’œil. En ce début août, les soldes sont là !

Rue Didouche Mourad, plusieurs magasins affichent des réductions  de 80%. Vérification faite sur place, cette réduction concerne à peine cinq articles. « Même s’ils me les donnent gratuitement, je ne les prendrais pas », ironise Nadia, une jeune chimiste de 27 ans. En effet, les articles soldés sont démodés et de très mauvaise qualité. Selon la jeune fille, les soldes en Algérie sont « une arnaque ». « Ils ne soldent que les vêtements qu’ils ont du mal à vendre car le modèle est moche ou la qualité et mauvaise. Les articles intéressants sont cachés jusqu’à la fin des soldes », dénonce-t-elle. Une vendeuse de ce magasin nous explique que seuls les articles qui se trouvent à l’intérieur d’une grande corbeille sont concernés par les soldes. Il s’agissait de quelques bustiers et Tee-shirts « made in China ».

D’autres boutiques mettent en vente des vêtements d’hiver. « Ils font ressortir des vêtements d’hiver qu’ils n’ont pas vendus pour les liquider maintenant. Ils n’exposent que quelques vêtements d’été qui ne sont pas soldés. Je ne comprends pas cette logique ! », s’étonne  une dame accompagnée de sa fille qui prépare son trousseau de mariage. « J’attendais les soldes pour acheter des vêtements d’été, mais je n’en trouve pas. Soit c’est l’Aïd, soit ce n’est pas soldé », témoigne la future mariée. « Ce ne sont pas des soldes, mais de la poudre aux yeux. C’est une manière d’attirer les gens et de les pousser à acheter », ajoute-t-elle.

Des soldes qui n’attirent pas grand monde !

Au centre commercial « Ardis », à l’est d’Alger,  les gens ne se bousculent pas.  Dans cette grande surface très fréquentée, les boutiques n’ont pas lésinées sur les moyens pour attirer le chaland, les gens rencontrés ne semblent pas conquis. « Les acheteurs n’ont toujours pas la culture des soldes », expliquent une caissière dans un magasin de prêt-à-porter. Imène, étudiante en 2e année à la faculté de Bab Ezzouar, nous livre ce qu’elle pense des soldes. « Chaque année, c’est la même déception. À chaque fois que je déniche un article intéressent, la vendeuse me dit qu’il n’est pas soldé », estime-t-elle. « Les soldes en Algérie n’ont aucune logique. Les commerçants les lancent lorsqu’ils veulent. Le client n’est pas du tout pris en considération », regrette la jeune fille. Elle avoue qu’elle préfère acheter dans des périodes où il n’y a pas de soldes. « J’ai beaucoup plus de choix, car les commerçants exposent toute la marchandise contrairement à cette période, où ils en cachent la moitié », dit-elle.

Une pratique anarchique !

Les soldes sont une pratique commerciale réglementée en Algérie et ce, à travers le décret exécutif n° 06-215 du 18 juin 2006, fixant les conditions et les modalités de réalisation des ventes en soldes et ventes promotionnelles. Selon les mesures fixées, les soldes sont autorisés deux fois par an ; en juillet et janvier. On est au mois d’août et les soldes se poursuivent. Certains commerçants lancent leurs soldes dans les semaines à venir. « Nos produits ne sont toujours pas soldés. Nous lancerons l’opération dans une semaine ou deux », dit un commerçant de la rue Didouche Mourad. Avez-vous obtenu l’autorisation ? « Mais de quelle autorisation parlez-vous ? Cette loi ne veut rien dire. C’est mon magasin je solde quand je veux », lance-t-il avec rire mesquin.

En cas de non-respect de la réglementation, le commerçant risque une amende. Cela ne fait pas peur aux commerçants. « J’ai lancé les soldes depuis la dernière semaine de juillet sans avoir d’autorisation. Je n’ai jamais eu de problèmes », explique le propriétaire d’un magasin de sous-vêtements.

Des prix à la tête du client !

Autre problème relevé : l’absence des nouveaux prix sur le produit soldé. Dans un magasin de vêtements au centre commercial « Ardis », un seul rayon est consacré aux produits soldés. Il s’agit de quelques chemises et pantalons. Sur l’étiquette, seul l’ancien prix est affiché, alors que sur les vitrines du magasin on affiche plusieurs réductions. Elles oscillent entre  -20% et -60%. Nous interrogeons un des vendeurs sur les raisons qui font que les réductions ne sont pas mentionnées sur les produits alors que la loi l’exige. « On est là pour répondre à vos questions. Vous n’avez pas besoin de regarder l’étiquette ». « Cette chemise qui était à 3 800DA est soldée à 2 000DA ». Une collègue l’interrompt. « Non, celle-ci fait 2 300 actuellement ». Faute d’étiquetage, le client ne sait plus qui croire. Amina explique que les commerçants fixent le prix à la tête du client. « La réduction doit logiquement être la même pour tout le monde, mais en Algérie c’est au cas par cas », ironise la jeune fille de 28 ans.

Interrogé sur la question, Mustapha Zebdi, président de l’Association de protection des consommateurs (Apoce) est catégorique. « Les commerçants n’ont pas la culture des soldes ». Selon lui, à peine une centaine de commerçants demandent l’autorisation pour lancer les soldes. Il regrette également que cette activité ne concerne que certains produits. « Il  n’y a pratiquement que les sacs et vêtements qui sont soldés. Pas d’électroménagers, ni d’autres produits », fait-il remarquer. M. Zebdi met en garde contre la publicité mensongère. « Le client doit faire attention, car ce qui est affiché n’est pas toujours ce que l’on trouve à  l’intérieur de la boutique », prévient-il. Il explique qu’il est « impératif » que le commerçant sépare les produits soldés, de ceux non soldés et d’afficher le prix avant et après les soldes afin de ne pas induire le consommateur en erreur.


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