Abdelaziz Rahabi : « Notre diplomatie a besoin de sortir du tête-à-tête Algérie-Occident »

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Abdelaziz Rahabi est ancien ministre de la Culture et de l’information et ex-diplomate. Dans cet entretien accordé à TSA, il revient sur la décision de l’Algérie de redéployer sa diplomatie en renforçant notamment sa présence en Afrique, en Asie et en Amérique Centrale.

Pourquoi l’Algérie veut-elle redéployer sa diplomatie ?

Je pense qu’elle le fait parce que le diagnostic de ces dix dernières années n’est pas très favorable. Nous avons redimensionné notre appareil diplomatique ces dernières années en direction de l’Occident et particulièrement en direction de l’Europe, ça ne nous a pas avancés à beaucoup de choses.

Au même moment, nous avons négligé notre profondeur stratégique naturelle qui est l’Afrique. A mon sens l’Algérie ne sera une puissance diplomatique que si elle a une politique africaine. On a par exemple le Président qui s’est rendu sept fois à Paris et il ne s’est pas rendu une seule fois dans les pays du Sahel. Ça vous renseigne sur l’orientation générale de notre politique étrangère depuis les années 2000.

Nous mesurons aujourd’hui combien nous avons besoin de redéployer cette diplomatie pour la rendre plus conforme à nos intérêts stratégiques, c’est-à-dire l’Afrique, l’Amérique latine et l’Asie, qui sont des continents qui ont joué de façon historique un rôle dans la politique étrangère algérienne. Nous avons perdu des positions dans ces pays, des positions qui étaient acquises autrefois.

La multiplication de menaces à nos frontières, des menaces qui ont aujourd’hui changé, en arborant de nouvelles formes, nécessite des rapports stratégiques avec les pays voisins. C’est pour ça que la diplomatie a besoin de se redimensionner et sortir de ce tête-à-tête Algérie-Occident.

Quels sont les enjeux de ce nouveau redéploiement diplomatique ?

Je pense qu’il est urgent et opportun, au vu des multiplications de menaces à nos frontières, et parce que aussi la politique extérieure de l’Algérie doit pouvoir défendre des dossiers comme les échanges internationaux et les questions de décolonisation.

Il y a une inégalité dans les échanges internationaux, il y a encore un problème d’autodétermination et d’émancipation des peuples en Palestine et au Sahara Occidental. Nous devons défendre le caractère global de la lutte antiterroriste.

Ce sont des dossiers que nous devons défendre. Je pense que le ministère des Affaires étrangères a fait une évaluation, et après cette évaluation il propose une politique de redéploiement diplomatique.

Nos diplomates sont-ils outillés pour jouer aux VRP de l’économie hors hydrocarbures ?

Nous avons des diplomates de qualité. Mais il faut que le gouvernement ait une visibilité et une économie avec des objectifs clairs. Le diplomate n’est que le représentant de son pays, on a souvent fait injustement le procès de la qualité du diplomate. Le diplomate ne peut proposer que ce que l’Algérie peut proposer, c’est ça le problème.


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