Abdelaziz Rahabi : « La diplomatie algérienne a consisté pendant 15 ans à plaire à l’Occident »

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Abdeaziz Rahabi est Diplomate et ancien ministre de la Culture et de l’information. Il explique dans cet entretien les raisons de la réaction tardive de l’Algérie concernant la situation à Gaza.

Comment expliquez-vous la réaction tardive de l’Algérie concernant la situation à Gaza ?

Quand on dit l’Algérie,  il ne faut  pas parler que de la position officielle mais il faut  parler de la réaction  de toute l’Algérie, à savoir société et pouvoir public, que je trouve choquante. Le peuple algérien vit avec beaucoup de colère et tristesse ce qui se passe à Gaza mais il est incapable d’exprimer une réaction. Le drame de l’Algérie est là. On vit une colère interne mais personne n’est en mesure d’exprimer une réaction ou de manifester sa colère ou son rejet.

Concernant la réaction tardive  du gouvernement, je ne suis pas du tout étonné. En quinze ans l’Algérie n’a absolument rien dit sur la Palestine, ni sur l’Irak. Elle était occupée à plaire à l’Occident. C’est ce qu’on a appelé le retour sur la scène internationale. Je vous donne un exemple, l’Algérie n’a pas reçu un seul dirigent palestinien depuis huit ans. Lorsque vous posez la question aux officiels ils vous disent qu’il faut que les palestiniens s’entendent d’abord, entre eux, alors qu’auparavant c’était l’Algérie qui faisait que les palestiniens s’entendent entre eux.

Autre exemple, le conseil national palestinien s’est réuni à Alger pour proclamer la naissance de l’État palestinien en novembre 1988, c’est-à-dire, à  moins d’un mois des événements d’octobre 1988. En dépit des conséquences de ces événements, le gouvernement algérien  n’a pas reporté ou annulé la réunion du conseil national. On voit à travers cet exemple l’engagement de l’Algérie. À cette époque on n’avait pas peur de ne pas plaire aux amis d’Israël, contrairement à ces quinze dernières années.

Comment on peut qualifier la diplomatie actuelle de l’Algérie ? Privilégie-t-elle ses relations avec l’Europe et les Etats-Unis plutôt que le monde arabe ?

L’Algérie n’a pas changé de position concernant la cause palestinienne mais elle la manifeste moins clairement. La diplomatie algérienne a consisté, pendant quinze ans, à plaire à l’occident. Il faut reconnaitre qu’il y a une sorte de correction depuis l’arrivée de Ramtane Lamamra où on voit un intérêt plus important pour le monde arabe et le Sahel.

Est-ce que le fait que Hamas  incarne la résistance palestinienne dérange l’Algérie ?  Sachant que Hamas est considéré par les occidentaux comme un groupe terroriste et que l’Algérie est très impliquée dans la lutte contre ce dernier…

Hamas est un gouvernement élu qui a une légitimité populaire. Il reste un parti politique palestinien et non un groupe terroriste comme l’ont classé les occidentaux. Nous avons à respecter le choix du peuple palestinien qui nous respecte énormément et qui attend beaucoup de nous.

Nous avons toujours parlé avec la direction palestinienne c’est-à-dire pour nous c’est Abou Mazen qui parle au nom de la Palestine et non pas Hamas. En plus Hamas n’est pas à l’origine de la résistance palestinienne. Il n’est qu’un acteur parmi d’autres. Cela ne devrait poser aucun problème à l’Algérie.


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