Sonatrach a annoncé, ce dimanche 7 décembre, un projet d’investissement de 90 milliards de dollars sur la période 2015-2019 qui permettrait d’augmenter sa production à 225 millions de tonnes d’hydrocarbures en 2019. L’annonce a été faite par Saïd Sahnoun, P-DG intérimaire de la compagnie pétrolière, lors du sommet nord-africain du pétrole et du gaz qui se tient en ce moment à Alger.
Sonatrach annonce en effet ces investissements colossaux alors que le cours du pétrole a chuté à son plus bas niveau depuis cinq ans. Cette décision soulève plusieurs interrogations. La première est d’ordre pragmatique, est-il raisonnable de se lancer dans de tels investissements alors que l’heure est à la rigueur et le discours officiel à la diversification de l’économie ?
Se tirer une balle dans le pied
Si les revenus de l’État sont destinés à diminuer avec la baisse du pétrole, l’Algérie devrait-elle donner suite à de tels projets au lieu d’accorder la priorité à d’autres secteurs pour mieux équilibrer son économie et réduire sa dépendance vis-à-vis des hydrocarbures ? En décidant d’investir massivement, Sonatrach ne fera qu’aggraver notre dépendance à l’égard des hydrocarbures. Pour l’Algérie c’est se tirer une balle dans le pied.
La deuxième interrogation est d’ordre pratique. Durant la dernière réunion de l’Opep, l’Algérie faisait partie des pays favorables à une baisse du plafond de production du cartel afin de réduire la quantité de pétrole disponible dans le but de relever le cours de ce dernier. Dans un contexte mondial de surproduction pétrolière, quel intérêt aurait l’Algérie à augmenter drastiquement sa production alors que le prix du baril continue de chuter ? Surexploiter nos ressources pour les brader n’est pas la meilleure stratégie.
Des annonces sans lendemain
Ce n’est pas la première fois que Sonatrach annonce des investissements importants. En 2008, Mohamed Meziane, P-DG de la compagnie (inculpé dans des scandales de corruption en 2010) annonçait déjà des investissements de 45 milliards sur quatre ans.
En 2009, Chakib Khelil, ancien ministre de l’Énergie, également inculpé dans les affaires de corruption liées à Sonatrach, renchérissait avec un chiffre plus important 63 milliards de dollars d’investissements sur cinq ans pour augmenter la production.
En 2011, c’est Youcef Yousfi, ministre de l’Énergie, qui dévoilait son chiffre : 60 milliards d’investissements de Sonatrach sur la période 2011-2015. Le 19 juillet dernier, Sonatrach annonçait 42 milliards de dollars d’investissements sur les cinq ans à venir. Six mois plus tard, le montant atteint 90 milliards de dollars.
On ignore si ces investissements ont été réalisés. Mais une chose est sûre : depuis 2008, la production pétrolière et gazière de l’Algérie est en déclin continu.