Pourquoi le FLN plaide-t-il pour l’instauration d’un État civil ?

conseil constitutionnel

Le patron du FLN, Amar Saâdani plaide pour l’instauration d’un État civil à l’occasion de la révision de la Constitution. Cette demande signifie-t-elle que l’Algérie n’est pas un État civil ? Ou plaide-t-il la primauté du civil sur le militaire ? Le patron du FLN veut-il que des civils soient nommés à la tête de toutes les institutions comme le ministère de la Défense, la DGSN, confiées à des militaires ?  La constitutionnaliste Fatiha Benabou apporte quelques réponses.

Tout d’abord, elle préfère parler d’un « pouvoir civil » au lieu « d’un État civil ». Sur le plan constitutionnel et juridique, l’Algérie est « un État civil », affirme-t-elle. « En droit, précise-t-elle, un État civil, est défini comme étant une forme évoluée, moderne du pouvoir qui se base sur des principes fondamentaux comme la séparation des pouvoirs ou encore la souveraineté du peuple, etc ».

Le projet du FLN, tel que défendu par son patron Amar Saâdani, cible donc « le pouvoir miliaire », selon l’analyse de Mme Benabou.  « Le pouvoir civil vient en opposition au pouvoir militaire et/ ou religieux », explique-t-elle. Seul inconvénient, « En analysant la constitution algérienne, il n’y a rien qui prouve l’interférence de l’armée dans les affaires politiques », note-t-elle. « Les prérogatives politiques dans la constitution de 2008, sont quasiment concentrées au niveau du pouvoir exécutif exercé par un président civil, en l’occurrence, Abdelaziz Bouteflika », insiste-t-elle.

Et, c’est tout le paradoxe du régime politique algérien. «  L’article 25 de la constitution est claire : l’Armée nationale populaire a pour mission permanente la sauvegarde de l’indépendance et la défense de la souveraineté nationales et de l’unité de notre territoire ». Il n’y a donc aucune mission politique pour l’ANP dans la constitution. Mais l’exemple du DRS prouve que ce n’est pas le cas. « Un département inexistant dans la constitution mais dont l’intervention dans le domaine politique est souvent dénoncée », remarque Mme Benabou. « Le DRS n’a aucune existence légale dans la constitution. Son rôle comme celui de l’armée ne peut être redéfini donc dans le cadre de la prochaine révision constitutionnelle » estime-t-elle. « C’est dans la pratique et non dans le droit qu’apparait l’intervention du DRS dans la politique », poursuit-elle.

Pour la constitutionnaliste, l’instauration d’« un pouvoir civil » est d’abord une « affaire politique ». « C’est de la politique constitutionnelle ou comment changer l’état des rapports politiques », explique Mme Benabou. Selon elle, instaurer un pouvoir civil en Algérie peut se faire dans les coulisses à travers un balayage interne. « On ne peut pas remédier juridiquement à des situations qui n’existent pas dans les textes de loi », conclut-telle.


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