Air Algérie à la dérive

boultif

Trois ans après sa désignation au poste de P-DG d’Air Algérie, Mohamed Salah Boultif fait face à une situation de crise sérieuse. Le crash du vol AH 5017 et la multiplication des retards sur les vols internationaux en pleine saison estivale mettent à nu les défaillances du management de la compagnie nationale.

Un P-DG issu de la « promotion Megueddem »

Comment Mohamed Salah Boultif, un cadre qui a fait l’essentiel de sa carrière dans le service commercial de la compagnie avant de diriger Tassili Airlines, s’est-il retrouvé en juin 2011 à la tête d’Air Algérie ?

Au printemps 2011, Wahid Bouabdallah, le prédécesseur de M. Boultif, fait face à des mouvements de protestation à répétition qui ont des allures de tentatives de déstabilisation actionnées à distance. Il multiplie les annonces et les initiatives sociales (augmentations de salaire, primes…), mais la grogne persiste.

Lâché par sa tutelle, il décide de jeter l’éponge. Il remet sa démission au président Bouteflika qui l’accepte sans hésiter. Il demande à son secrétaire particulier, Mohamed Rougab, de lui proposer rapidement un remplaçant. M. Rougab exhibe alors un seul CV qui lui avait été remis quelques semaines auparavant par Mohamed Megueddem dans la perspective d’un changement à la tête d’Air Algérie. Le 18 juin dans la matinée, Wahid Bouabdallah est informé de son « limogeage » au téléphone. Dans l’après-midi,  Mohamed Salah Boultif lui succède.

Un « intouchable »

Comme tous les P-DG qui doivent leur nomination à Mohamed Megueddem, Mohamed Salah Boultif est un « intouchable ». Il n’a de compte à rendre à personne. Au début de l’été, après le scandale des fausses réductions pour les émigrés qui n’ont pas été appliquées par Air Algérie malgré une annonce gouvernementale officielle, Amar Ghoul, ministre des Transports, s’est plaint de lui auprès de certains de ses collègues au gouvernement et de responsables de l’État : « Je ne peux plus travailler avec lui. Je ne le supporte plus ». Mais en Algérie, la nomination des P-DG des entreprises publiques ne dépend pas des ministres. C’est la présidence qui décide.

Pourtant, M. Boultif n’est pas à sa première maladresse. À la tête d’Air Algérie, il inaugure son mandat par une décision surprenante. Il décide de résilier le contrat de réalisation du nouveau siège de la compagnie, confiée en 2011 par son prédécesseur à l’entreprise canadienne SM. Cette dernière, après avoir tenté de trouver une solution amiable, lance une procédure d’arbitrage international : elle réclame 120 millions d’euros à Air Algérie.  Pourquoi M. Boultif a-t-il pris une telle décision ? Air Algérie ne s’est jamais expliquée.

Sur le plan opérationnel, malgré les nombreuses annonces d’acquisition de nouveaux appareils, la flotte de la compagnie semble toujours aussi réduite et vieillissante, comme le montrent les nombreux retards et les incidents à répétition sur les appareils, ces derniers jours.

Aujourd’hui, ni le crash du vol AH 5017, ni les retards qui scandalisent les voyageurs ne semblent ébranler la quiétude du management de la compagnie. La responsable de la communication d’Air Algérie ne répond pas aux journalistes. Quant au P-DG, il serait en vacances, comme de nombreux autres cadres de l’entreprise.


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