La chronique de Hafid Derradji : les enfants de l’Algérie et les amis de l’Algérie !

Hafid Derradji

Encore une fois, les autorités algériennes ont échoué dans leur gestion des événements et des développements de l’heure car n’ayant pas su suivre les normes et les coutumes de la culture de l’état qui leur fait défaut et dont ils doivent être imprégnés après le décès de l’auteure algérienne Assia Djebar et de l’acteur français Roger Hanin.

Ces autorités ont omis de secourir le Moudjahid et l’ancien ministre des affaires religieuses Abdelhamid Amokrane, l’écrivain et ancien diplomate Mohamed El Mili, hériter de l’illustre cheikh Mebarek El Mili et autres femmes et hommes algériens, vivants ou morts qui ont vécu miséreux et sont morts étrangers dans leur propre pays.

Ceci est une autre image de l’échec dans la gestion des faits et dans la consécration de la culture de la reconnaissance à l’égard des grands de ce pays. Ceux qui ont soutenu le pays sans avoir à montrer allégeance aux riches et aux hommes de pouvoirs, ni à ceux qui veulent déformer l’histoire et consacrer la culture de l’oubli. Cette culture de l’omission qui efface les compétences, les réalisations et les exploits des penseurs, des artistes et des fidèles. Cependant, je ne pourrais juste mettre cela que sur le compte des autorités car les partis, les organisations et autres sociétés civiles ne sont pas en reste.

Les décideurs de mon pays ont répondu favorablement au souhait de l’acteur français Roger Hanin d’être enterré à Alger, lui qui est né dans cette ville et l’a quittée juste avant la Révolution. Il l’a gardée dans son cœur jusqu’à sa mort, comme ce fut également le cas pour ses parents et ses grands-parents, nés également à Alger.

Ceci n’est qu’une simple reconnaissance à l’égard d’un homme à qui Bouteflika a accordé la médaille d’honneur en 2000, une médaille dont peu d’illustres Algériens peuvent se targuer de l’avoir obtenue. Or, le bât blesse devant cette politique de deux poids deux mesures appliquée selon qu’on soit amis de l’Algérie ou son propre enfant. Ce « piston » est même appliqué pour les Algériens eux-mêmes, suivant leurs revenus, leur appartenance ou leur descendance….malheureusement le facteur « contributions au pays » n’est pas pris en considération.

Bouteflika avait décidé d’envoyer l’avion présidentiel en France pour ramener la dépouille du défunt acteur mais il s’est rétracté à la dernière minute, évitant un énième scandale. Roger Hanin a eu un accueil officiel dont peu de personnalités algériennes ont pu bénéficier. La plupart sont mortes et parties dans le silence le plus complet. Assia Djebar s’en est allée paisiblement et dans une telle discrétion comme le témoigne le transport de sa dépouille dans un avion d’Aigle Azur …aucun acte de naissance n’a été enregistré dans sa commune natale car elle n’était surement pas de ceux qu’on qualifierait d’opportuniste.

Les faits ne s’arrêtent pas là et l’histoire du système algérien est jonchée d’événements similaires qui ont méprisé des personnalités nationales toujours vivantes comme c’est le cas du leader Hocine Ait Ahmed, qui a préféré passer ses derniers jours loin du pays et de l’exploitation massive de son état de santé. Que dire du Moudjahid et ancien diplomate Mohamed El Mili qui a dû faire un appel aux autorités algériennes pour l’aider alors que son père et lui ont donné à l’Algérie ce que tant d’autres n’ont jamais donné mais jouissent de la liberté et des biens pour lesquels d’autres se sont tant battus.

Le mépris, le manque de reconnaissance, et cette politique de deux poids deux mesures se sont érigés en culture pratiquée par le Président et ses ministres, les directeurs, chef de partis, organisations, associations et autres sociétés civiles. Elle s’est même transformée en complexe dont on continuera à en souffrir et à en pâtir si nous nous ne nous remettons pas en question pour comprendre et savoir comment traiter autrui convenablement pendant et après leur départ.

Aucun d’entre nous ne rejette une quelconque reconnaissance envers tous ceux qui nous respectent et nous aiment, des amis de l’Algérie qui ont soutenu son peuple, sa révolution et ont soutenu sa cause au cours de l’histoire mais personne ne peut accepter que les enfants du pays tels les moudjahidines, hommes de lettres, et autres artistes soient traités de façon méprisante. Une telle culture du mépris ne peut rien générer de bon.

Les Algériens doivent apprendre et grandir dans une culture de considération et de respect des illustres et des grands du pays, ceux qui se sont battus pour lui sans attendre rien en retour et sans prendre en considération leur appartenance ou leur soutien à un régime ou un autre, ni leur lieu de naissance car l’amour du pays et ce sentiment de lui appartenir est aussi large que rien, ni même les frontières ne peuvent le contenir.


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