Abdelmalek Serrai est économiste. Il revient sur la question des fraudes aux importations, en Algérie.

Serrai

Des milliards de dollars transférés illégalement tous les ans via la fraude aux importations. Comment sommes-nous arrivés à cette situation?

Cette situation existe bel et bien depuis des années. Mais ces derniers temps nous avons constaté qu’elle s’est aggravée à différents niveaux. Cette nouvelle situation est due à la faiblesse de nos services. Ni la douane, ni les banques, ni la chambre de commerce, et ni les services de sécurité n’ont mis leurs poids pour arrêter ce phénomène.

On se retrouve maintenant avec de gros capitaux à l’étranger qui sont devenus visibles, pas comme auparavant. Avec des projets industriels dans de nombreux pays, tels que l’Espagne, la Chine, Taiwan, la Turquie, la France, et même dans les pays voisins comme la Tunisie et le Maroc.

Il y a plusieurs techniques de fraude. Généralement, les fraudeurs procèdent en surfacturant leurs produits importés mais malheureusement nos banques n’ont pas suffisamment d’outils, et n’ont pas mis en place des cellules d’alerte pour ce genre de fraudes.

Certains autres ont recours aux fausses déclarations. Par exemple, ils importent des produits de très basse qualité mais ils les déclarent comme produits de haute qualité. Le comble est que seuls les laboratoires spécialisés en contrôle de qualité peuvent déterminer la valeur réelle des produits importés.

Je suis au courant de certains cas choquants. Il y a des fraudeurs qui ont ramené de l’eau au lieu d’importer de l’huile. D’autres aussi ont ramené des cailloux dans les conteneurs.

Parmi les causes qui ont engendré cette situation, il y a le problème d’éthique aussi. Malheureusement, les gens n’ont pas honte de voler. Ils se croient intelligents en volant leur pays.

Comment jugez- vous les mesures mises en place par les autorités afin de mettre un terme à cette situation ?

Je pense que les mesures prises par les autorités ne sont pas largement suffisantes. La première action, à mon avis, est de revoir la liste des produits au niveau de la douane, et arrêter l’importation d’une grande partie, dont on n’a pas besoin.

Il faut aussi, qu’il y ait une application stricte au niveau des banques, avec surveillance policière et douanière.

Quelles sont les solutions face à cette fraude massive?

 La situation est tellement grave que tout le monde est condamnable. On doit tous s’engager et assumer notre part de responsabilité. La douane, la police, la chambre de commerce, les banques, et même les associations patronales.

Il faut, également, mener une action culturelle d’envergure. Faire des campagnes de sensibilisation, pour enraciner les valeurs et l’éthique du commerce international, est devenu indispensable.

En outre, il faut revoir tout le cadre juridique. Il n’y a pas suffisamment de sanctions pour faire face aux cas de fraude et de corruption. Cette dernière, surtout, qui fait des ravages chez nous.

 


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