La chronique de Hafid Derradji. Nous ne sommes pas tous « Charlie » ni tous « Kouachi » !

Hafid Derradji

L’attaque perpétrée contre Charlie Hebdo, qui a fait 12 morts au centre de Paris, suivie de la prise d’otages, aussi sanglante, ont marqué ce début d’année 2015. La barbarie de ces effroyables crimes ont permis à la machine médiatique française et mondiale de se mettre en route et de mobiliser l’opinion internationale sous le slogan « Je suis Charlie ». Le but d’une telle action ? Exprimer leur condamnation et dans la même foulée, remettre sur la table le débat sur le terrorisme, l’islam, les étrangers et la liberté d’expression. Cette situation a également été l’occasion pour la droite extrémiste européenne d’inciter à la haine contre les immigrés musulmans dont le nombre avoisinerait les dix millions en Europe.

Il est vrai qu’il est légitime pour les Français de s’unir pour défier et combattre le terrorisme, d’être affligé devant la mort des leurs, de protéger la République et la cohésion sociale. Ils ont également le droit d’être « tous Charlie » en cette conjoncture et cela pour défendre la liberté d’expression. Cependant, ils ne peuvent forcer le monde entier à être Charlie. Ils n’ont pas non plus le droit de faire un amalgame entre Islam et terrorisme et d’imputer ces crimes hideux à tous les immigrés et musulmans qui vont sans doute payer le prix fort d’un groupe extrémiste sans scrupule.

Il est également vrai que ces actes sont criminels et terroristes. Ils sont intolérables. Tout acte terroriste par l’arme ou la propagande, en Algérie, en France, en Palestine, en Iraq ou en Syrie reste un crime. Toutes formes de terrorisme appellent une condamnation massive et internationale et une coordination des efforts pour mettre fin à ses causes sans incriminer une quelconque nationalité ou religion. Les frères Kouachi sont de nationalité française. Ils ont fait l’école française. Si on venait à mettre l’accent sur leurs origines algériennes alors il faudrait mentionner également celles de Zidane, Benzema, Djamel, Bouras et autres…

Les musulmans de France, qu’ils soient algériens ou autres, ne sont pas tenus d’être des « Charlie » et ne doivent s’excuser de rien, ni justifier leur croyance ou leurs positions car les auteurs de ces crimes ne représentent ni l’islam ni les musulmans. Le fait d’achever un policier blessé par terre ne représente en rien une vengeance du prophète Mohammed (QSSL). On ne peut pas non plus tolérer les atteintes aux religions monothéistes et ridiculiser les prophètes au nom de la démocratie et de la liberté d’expression car le terrorisme de la kalachnikov et des mitraillettes ne diffère pas en fin de compte du terrorisme de la plume et des mots.

Rien ne justifie les attaques sanglantes et barbares qu’a connues le journal mais rien ne justifie non plus les atteintes contre l’Islam et les musulmans. Nous devons tous demeurer dans une liberté d’expression respectueuse et noble qui s’interdit les atteintes sciemment faites contre les personnes et les religions. Ces atteintes sont devenues telles des actes héroïques. Le monde a besoin aujourd’hui de coexistences et d’acceptation de l’autre avec ses différences qu’elles soient culturelles ou religieuses. Le monde a également besoin aujourd’hui de démocratie et de liberté d’expression qui ne nuisent et n’offensent personne.


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