La chronique de Benchicou. L’Algérie entre l’Armée et les proxénètes

Benchicou

L’année 2014 se termine conformément à nos pires pressentiments. Il y a quelques mois, nous écrivions, à propos de « l’illusion Benbitour », que la situation d’aujourd’hui rappelle tragiquement celle de décembre 1991 avec, à la place des militants du FIS, un adversaire tout aussi redoutable, tout aussi pervers, peut-être plus cruel que l’islamisme : le système Bouteflika soudé autour de la prédation, uni par la forfaiture.

Toute élection organisée dans les conditions actuelles, sous cet État otage des forces prédatrices, reconduirait, pour cinq autres années, corrupteurs et corrompus à la tête du pays. Les présidentielles de 2014, si elles venaient à avoir lieu, consacreraient la victoire du clan Bouteflika à la tête d’un État faible, déstructuré et au service d’une terrible voyoucratie alliée aux kleptocrates du pouvoir et à la pègre pétrolière mondiale qui s’est installée sur les débris de l’État algérien démantelé depuis 14 ans. D’une mafia qui, progressivement, dit son nom. Personne ne pourra dire « je ne savais pas » et ceux qui s’aventurerait à prendre part à cette mascarade électorale auront contribué à tenir le couteau qui égorgeait leur mère.

Il semble bien, hélas, que nous y sommes. L’Algérie, impuissante face à la chute vertigineuse du prix du pétrole, agonise, vidée de ses richesses, orpheline d’un vrai État, est livrée aux trafiquants qui empêchent toute politique de réduction des importations et d’industrialisation du pays. Pour asseoir son pouvoir absolu, Bouteflika a déplacé le centre de gravité du pouvoir algérien avec l’aide de groupes de pressions arabes et occidentaux qui, de facto, gèrent l’Algérie à leur guise. Ce fut au prix de l’hécatombe nationale que s’est concrétisée, en toute conscience, la politique antinationale de ses trois derniers mandats. Et c’est pour maintenir la prédation, quitte à aggraver l’hécatombe nationale, que le quatrième mandat est déjà l’affaire des forces prédatrices formées par ces milliardaires de l’informel et la pègre pétrolière internationale installés au cœur de l’État et dont Saâdani est le cheval.

Autrement dit, les dirigeants algériens sont impuissants à rétablir les équilibres parce que l’initiative leur échappe totalement. Ils ne peuvent ni réduire les importations ni susciter une autre politique économique qui donnerait la priorité au secteur productif. La décision ne leur appartient pas. Tel est le vrai débat que personne ne veut engager.

Les journalistes de Tout sur l’Algérie (TSA) viennent de constater que « dans un contexte de baisse des revenus pétroliers, le gouvernement favorise clairement les importations » en plaçant les importateurs et les producteurs sur un pied d’égalité. Ainsi, alors que la situation économique dramatique exige une compression des achats à l’étranger et un encouragement des investissements productifs, le gouvernement a décidé d’unifier l’Impôt sur le bénéfice des sociétés (IBS), actuellement à 19% pour les producteurs et 25% pour les importateurs, en un seul taux unique de 23%. Le gouvernement travaille ouvertement pour les intérêts du cartel des importateurs.

Il vient de céder, par ailleurs, devant le lobby des importateurs de véhicules en reportant, une fois de plus, la généralisation des normes de sécurité sur les voitures importées (airbags frontaux et latéraux, freinage ABS etc.). Le cartel des importateurs était opposé à cette décision qui aurait, selon lui, augmenté les prix et donc réduit les bénéfices. En effet, note le journaliste, le consommateur privilégie encore les voitures moins chères au détriment de la sécurité. Par son absence, l’État, qui a failli à assumer son rôle de régulateur, est donc en partie responsable de l’hécatombe sur les routes du pays (plus de 4 000 morts par an).

Par ailleurs, apprend-on de ces mêmes journalistes, l’Algérie fait face au problème de surfacturation des véhicules importés. Nos confrères écrivent, en effet : « Profitant d’une réglementation floue, certains importateurs ont recours à des sociétés écrans basées à l’étranger qui achètent les voitures aux constructeurs, puis les revendent à leurs concessionnaires (et propriétaires) en Algérie, à des prix largement supérieurs à la réalité. C’est ainsi que ces importateurs se fixent des marges bénéficiaires confortables et se permettent de transférer des sommes colossales en devises. Tout cela au détriment de la vie des citoyens algériens. »

« Pour qui… roule le gouvernement et quels intérêts l’État protège-t-il ? », se demandent nos journalistes. Mais l’intérêt de forces mafieuses internes et externes, chers confrères !

Dans la prochaine chronique, nous en reparlerons avec plus de détails.


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