Gaz de schiste. L’État de New York renonce, Sonatrach persiste

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Le gouverneur démocrate de l’État de New York, Andrew Cuomo, a annoncé, mercredi 17 décembre, « l’interdiction définitive » du recours à la technique controversée de la fracturation hydraulique, mettant effectivement fin à l’exploitation de gaz et pétrole de schiste dans son État. La décision de M. Cuomo est motivée par la volonté de préserver et ne pas prendre de risques avec l’environnement et la santé des habitants.

Cette annonce intervient quelques jours après la déclaration du P-DG par intérim de la compagnie nationale d’hydrocarbures Sonatrach, M. Saïd Sahnoun, annonçant l’achèvement du forage d’un puits-pilote à In Salah et le début de l’exploitation commerciale du gaz de schiste en Algérie dès 2022.

Un impact destructeur sur l’environnement

L’extraction du pétrole et gaz consiste à forer des puits dans la pierre de schiste et y injecter, en grande quantité, de l’eau sous haute pression dans le but de fracturer cette roche et de libérer les hydrocarbures qu’elle contient. L’Algérie, un pays dont 95% de la surface est classée « zone aride » et qui souffre du stress-hydrique, a-t-elle intérêt à consacrer une telle quantité de ses précieuses ressources en eau à la production d’hydrocarbures, amenées à disparaître ?

En plus de l’eau, la fracturation hydraulique implique l’utilisation de divers produits chimiques extrêmement polluants, visant à séparer les différents éléments mélangés dans le sous-sol et en extraire le gaz ou le pétrole. Le danger de voir ces éléments se diffuser dans les sols (les rendant infertiles) et atteindre les nappes phréatiques (la nappe albienne dans le Sahara, par exemple) est réel, bien que de nouvelles techniques de forage tendent à réduire ce risque.

À l’ère d’un réchauffement climatique potentiellement dévastateur, le recours prolongé aux énergies fossiles, une industrie grande émettrice de gaz à effet de serre, semble pourtant désuet.

Rentabilité et viabilité : la question reste entière

Dans un contexte d’effondrement du prix du baril de pétrole, la rentabilité des hydrocarbures de schiste est très incertaine. En effet, les coûts de production relativement élevés en comparaison aux ressources conventionnelles, ne plaident pas en faveur des investissements massifs annoncés par Sonatrach, dans l’exploration de gaz de schiste notamment. En effet, Bank of America considère que de nombreux producteurs aux États-Unis, particulièrement ceux du bassin de Permian, vont être contraints de réduire, voire arrêter l’extraction d’hydrocarbures non conventionnels à cause d’un prix du baril jugé trop faible. Selon une estimation de la banque d’affaire américaine, « 15% des producteurs essuient des pertes et plus de la moitié des producteurs américains mettrons les clés sous la porte si le prix du baril passe sous les 55$ à New York ». La rentabilité des compagnies américaines dans le secteur est fortement affectée.

Par ailleurs, de tels investissements dans l’exploration sont, par définition, incertains : rien ne garantit des découvertes importantes. Il y a donc un risque de « gaspillage » d’importantes ressources financières, dédiées à la recherche d’une ressource éphémère et potentiellement peu ou pas rentable. Par ailleurs, la maîtrise de la technologie et des techniques nécessaires au forage fait que Sonatrach sera dépendante, pour plusieurs années au moins, des compagnies étrangères, notamment américaines. Cela remet en question la viabilité du projet et la voie choisie vers l’exploitation des hydrocarbures de schiste.


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