La chronique de Hafid Derradji. Développer le Sud avec la capitale

Hafid Derradji

Quand Bouteflika brillait par son absence lors d’événements officiels en raison de son incapacité, on angoissait pour la patrie : comment un pays comme l’Algérie ne peut pas se donner un président apte à s’adresser à son peuple et le représenter au sein des instances internationales ? Et lorsque le Président est apparu pour rendre hommage aux martyrs et pour recevoir ses visiteurs sans être capable de parler, de se lever et de marcher, alors nous avions pitié de lui et nous implorions son entourage de laisser l’homme se reposer, loin des supplices qui lui sont imposés à chaque fois qu’ils le mettent au-devant avec une posture convenable. S’il vous plait, libérez le pays pour qu’il puisse s’envoler à son tour vers de nouveaux horizons avec à sa tête un nouvel homme, une pensée évoluée et des politiques différentes.

Lorsqu’on apprend que le Président a effectué des remaniements diplomatique, judiciaire et administratif, on en vient à croire que le mépris du peuple a atteint son paroxysme. On essaye de nous convaincre que le Président pense, réfléchit et prend des décisions seul pour donner un nouveau souffle aux institutions de l’État comme cela se doit. On apprend également que la présidence prévoit de restructurer les ministères et les secteurs publics à travers la réintégration de certains ministères et la nomination d’un gouverneur au poste de ministre chargé de la Gestion des affaires de la capitale. Ceci ne présage rien de bon, excepté de l’existence d’un grand cafouillage et d’une confusion au plus haut point et dans les rouages de l’état. On veut faire croire au peuple que les gouvernants pensent à l’avenir du pays qui, en somme, ne manque de rien d’autre que d’une restructuration et non pas d’une révision globale du système.

Il est certes vrai qu’Alger est la capitale de toute l’Algérie. Lui accorder la priorité et l’intérêt qui lui reviennent de droit est aussi important que nécessaire. Mais cela ne doit pas se faire au détriment des autres wilayas car l’Algérie entière et tous les Algériens ont besoin d’attention et d’une restructuration d’autant plus que nous possédons les moyens nécessaires. La nomination d’un gouverneur au poste de ministre pour gérer les affaires de la capitale n’est nullement la priorité du moment car l’existence et la localisation même de toutes les administrations et des ministères à Alger devraient assurer indéniablement la résolution de tous ses problèmes, si tant soit peu que chaque ministre soit gouverneur de son secteur. De même, la restructuration des ministères doit intégrer un changement exhaustif des personnes, des politiques et des mentalités. Elle ne doit plus se baser sur des décisions administratives exhibitionnistes dont l’objectif est de confirmer la bonne santé du Président.

La restructuration de certains secteurs ministériels et leur intégration les uns aux autres à l’ombre du gèle et du recul actuels sont une autre farce de la gouvernance de l’État par délégation et par des personnes n’ayant cure des affaires de l’État et n’ayant comme seul objectif que de faire perdurer la présence de Bouteflika au pouvoir afin de détruire l’État et piller ses biens et rester aux pouvoirs. Ceci est d’autant plus vrai que depuis l’avènement de Bouteflika, nous avons consommé des centaines de ministres, construit des dizaines de ministères en vain, pour assurer la mauvaise performance, un service médiocre, la dilapidation et le pillage des deniers publics.

En revanche, la création d’un ministère pour le Développement du Sud de l’Algérie me semble nettement plus prioritaire en raison du mouvement que connait le Sud du pays actuellement. Cette région a besoin depuis fort longtemps de développement économique et social effectif qui impose la création d’un ministère pour résoudre tous les problèmes, avec la mise à disposition des fonds nécessaires et l’affectation des meilleurs talents dans tous les domaines pour accompagner la population dans un véritable projet de développement qui contribuerait à éteindre le feu de la discorde et rétablir l’équilibre entre le Nord et le Sud. En outre, un tel projet serait à même d’inverser le flux migratoire local, du Nord vers le Sud, et cela lorsque les conditions d’une vie décente promise par Bouteflika seront disponibles.

Toutes les décisions, mesures et actions temporelles prises récemment afin de calmer le front social et acheter la paix sociale auront un impact négatif sur l’avenir du peuple algérien et son État. Je pourrais prendre exemple du projet de création d’un fonds spécial pour les femmes divorcées qui, à mon sens, encouragera les mères et les femmes à recourir au divorce alors qu’on devrait renforcer le lien familial à travers la création d’un fonds pour les veuves qui, elles, ne disposent ni de soutien familial ni de source de revenus. Cette action devrait, à l’opposé, préserver la cohésion au sein de la famille algérienne et donner à nos enfants un meilleur sens de la famille et des conditions de vie meilleure.

Le clan du Président a toujours fait croire à l’opinion publique que Bouteflika réfléchissait mieux que tous les Algériens et possédait toutes les capacités mentales et physiques requises pour tenir les rênes du pays. Selon leur dires également, ce dernier s’attèle à tenir les promesses faites durant les présidentielles. Or, nombreux sont les Algériens qui sont convaincus que l’Algérie va droit au mur, en particulier avec la baisse des prix du pétrole, le recul des valeurs et de l’éthique et l’éclosion de tous les aspects liés au désespoir et à la misère au sein de la population.

derradjih@gmail.com


Pour commenter nos articles, rendez-vous sur notre page Facebook,
en cliquant ici