Entretien avec le président du RCD Mohcène Belabbas

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Mohcène Belabbas, président du RCD, est l’un des membres de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) de l’Instance de concertation et de suivi de l’opposition (Icso) Dans cet entretien, il revient sur l’appel lancé par l’Icso aux Algériens, l’initiative du FFS, les festivités du 1ernovembre.

Vous avez lancé un appel aux Algériens pour vous accompagner dans votre projet pour la transition démocratique. Comment peuvent-ils le faire ?

 D’abord, la première manière de nous accompagner est de faire sien le discours développé par cette classe politique (Icso) qui s’est réunie dans le cadre d’une initiative visant une transition démocratique. Plus il y a un débat au niveau des différentes couches de la société sur la question de la transition démocratique, de la vacance du pouvoir, des solutions pour faire redémarrer l’économie nationale, plus on réussira à sensibiliser le peuple algérien. Le sensibiliser sur l’urgence de peser de façon à pousser ce pouvoir soit à venir à la table des négociations avec l’opposition, soit à céder le pouvoir et s’impliquer dans l’organisation d’une transition démocratique.

Vous n’excluez des actions celle de descendre dans la rue…

 Il faut savoir que nous sommes dans un pays où le pouvoir essaie de faire peur au citoyen et à la classe politique avec l’idée de sortir dans la rue. Sortir dans la rue, à travers des sit-in et des marches, est un des outils légaux de l’exercice politique. Ce sont des droits reconnus par la première loi du pays, mais nous sommes dans un pays où le pouvoir viole les lois.  Les partis politiques et les associations ont donc le droit d’organiser des marches. L’essentiel est de déposer des demandes d’autorisation. Sauf que ces demandes sont rejetées, depuis une vingtaine d’années, par le pouvoir. Ce qui a contraint beaucoup d’acteurs politiques et de la société civile à passer outre ces demandes. Et puis, les citoyens sont, chaque jour, dans la rue. Dernièrement, des policiers sont sortis dans la rue sans demander d’autorisation. En fait, c’est une question de temps. Le peuple algérien va sortir dans la rue ! Il sortira soit sous l’organisation de la classe politique, soit il sortira de lui-même et là ça va être plus difficile à gérer.

 Pensez-vous que l’opposition est unie comme vous l’affirmez dans votre appel ?

Ces dernières années et notamment ces derniers mois, il est apparu que nous avons désormais une opposition au pouvoir et une opposition du pouvoir. S’agissant de la première, elle est unie. Je pense qu’un consensus a été construit depuis la conférence de Mazafran (conférence de la CNLTD du 10 juin). Cette opposition a assumé la plateforme pour les libertés et la transition démocratique et elle a réussi à se réunir dans une instance où différentes sensibilités siègent, analysent la situation ensemble, décident des actions ensemble et continuent la concertation notamment avec la société civile. Quant à la seconde, je dirais que c’est une nouvelle forme d’opposition. Une opposition du pouvoir qui ne s’exprime que pour critiquer les initiatives de l’opposition au pouvoir. Une opposition qui ne prend pas position quand il y a des événements importants. Nous avons constaté chez ces acteurs de l’opposition du pouvoir, un silence radio sur les questions de la vacance du pouvoir, du quatrième mandat, de la dénonciation des fraudes électorales.

Parlez-vous du FFS ?

Je dis qu’il y a plusieurs partis politiques qui se sont inscrits dans ce segment.

Vous classez le FFS dans ce segment ?

Les sigles qui sont dans cette opposition ne sont pas importants. L’opinion publique sait, à travers les positions des uns et des autres, qui est dans l’opposition au pouvoir et qui est dans l’opposition du pouvoir.

Que pensez-vous de l’initiative politique lancée par le FFS (la conférence nationale du consensus) ?

Pour l’instant, nous n’avons pas vu d’initiatives. On nous parle de feuilles blanches et au niveau du RCD, on ne sait pas lire les feuilles blanches. Depuis une année, l’opposition au pouvoir parle d’une transition démocratique inclusive, de la construction d’un nouveau rapport de force qui nous permettrait de peser dans la négociation avec le pouvoir. Car nous disons aussi qu’il viendra le jour où il faudra discuter avec le pouvoir mais il faudra discuter avec le pouvoir réel autour d’un projet bien défini dès le départ. Pour le reste, ce sont des mots.

Avez-vous reçu une invitation pour des consultations  avec le FFS ?

Au niveau du RCD, nous sommes dans des consultations bilatérales depuis plus d’une année. Pratiquement chaque semaine, nous recevons au niveau du siège national, deux à trois acteurs politiques. Les derniers en date sont M. Ali Benouari et M. Karim Tabbou. Il est important de rappeler que le RCD est déjà membre d’une coordination qui a construit une initiative sérieuse et crédible et qui a concrétisé toutes ses décisions et actions. Cette construction a été difficile et n’a pas encore abouti parce qu’on n’est pas encore arrivés à créer le rapport de force nécessaire nous permettant d’imposer définitivement l’idée de la transition démocratique. Nous sommes toujours dans la phase de construction. Cette coordination s’est exprimée, ces derniers temps, (sur l’initiative du FFS, ndlr) et le RCD est membre de cette coordination donc il revendique la position de cette coordination.

 Donc le RCD estime qu’il s’agit d’une manœuvre…

Encore une fois, moi je dis qu’il n’y a pas d’initiatives pour l’instant et je ne sais pas lire les feuilles blanches dont on nous parle !

Comment expliquez-vous le désintérêt apparent des Algériens concernant les festivités du 1er novembre ?

Il y a un désintérêt certain et il a été provoqué par le pouvoir en place. Depuis plusieurs années, il y a une volonté de squatter les symboles de l’histoire et de la mémoire. Quand on décrète dans notre pays qu’il y a une famille révolutionnaire, on sous-entend qu’il y a une famille non-révolutionne voire même de harkis. Alors que, depuis 1962, les dirigeants algériens se plaisent à dire que la révolution algérienne, c’est la révolution du peuple. Pourquoi donc parler de famille révolutionnaire ? C’est ce qui a conduit le citoyen à se désintéresser, pas de la Révolution de Novembre, mais des festivités officielles organisées par le pouvoir algérien. Car on les retrouve souvent, ces mêmes citoyens,à participer à des activités organisées soit par les partis politiques de l’opposition, soit par des associations de la société civile.

 


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