La chronique de Hafid Derradji : déçu mais confiant

Hafid Derradji

Lors de mon séjour en Algérie, cet été, j’ai pu observer certains secteurs et rencontrer différents intervenants, y compris de hauts cadres de l’État, j’ai ressenti un sentiment de déception et de tristesse pour ce qui est de la situation politique, sociale, économique et éthique. Un sentiment né des pratiques de certaines parties dont le seul souci est de manigancer pour se maintenir au pouvoir et continuer à avoir de l’influence et des avantages par n’importe quel moyen.

Cependant, j’ai constaté aussi que d’autres parties ayant des responsabilités au niveau de l’État ne baissent pas les bras et gardent l’espoir d’un avenir meilleur pour le pays. Elles tiennent à assumer pleinement leurs engagements comme elles l’ont toujours fait afin d’éviter toute déviation.

J’ai remarqué chez eux énormément de déception et de tristesse sur l’impasse politique et le déclin des partis de la majorité qui n’arrivent plus à jouer leur rôle. Ils s’inquiètent aussi de la condition de la classe politique incapable d’apporter le changement ou d’offrir une alternative. Une classe politique qui n’arrive pas à former une force à même d’influencer le cours des événements.

Cependant, j’ai senti chez tout ce monde, une lueur d’espoir pour un avenir meilleur, qui ne saurait ressembler à celui d’aujourd’hui.

J’ai constaté de la déception et de la tristesse  de hauts fonctionnaires qui n’ont pas été à la hauteur de la confiance qu’on leur a accordée. Des fonctionnaires qui ont failli dans leurs missions se contentant de répondre aux ordres pour satisfaire le désir du Président et de son entourage. Malgré cela, ils se retrouvent écartés et humiliés après avoir causé la faillite de nombreuses institutions de l’État en raison de leur déficience ou de leur complaisance avec certains groupes mafieux.

J’ai constaté aussi de la déception et de la tristesse pour l’indifférence d’un peuple démissionnaire. Un peuple qui a perdu l’amour de la patrie qui l’a caractérisé à travers l’histoire, et ce, en dépit de l’échec enregistré dans plusieurs domaines. Un peuple qui reste indifférent même lorsque la dignité et la souveraineté des Algériens sont touchées.

J’ai constaté cette déception, cette tristesse et même de la douleur face au silence qui entoure les scandales de pillages et de corruption. Un fléau endémique qui s’est installé à tous les niveaux et qui a atteint des proportions sans précédent et cela, au vu et au su de tous. Et face à tout ça, notre mémoire devient très courte et on finit vite à mettre dans les tiroirs les scandales de Sonatrach, de l’autoroute Est-Ouest et de l’argent pillé et gaspillé, à croire que ces choses ne nous concernent pas, au point d’en devenir complices.

J’ai constaté de la déception et de la tristesse quant à la situation des médias public et privé, malgré la multiplication des chaînes de télévision et l’émergence d’une nouvelle génération de journalistes prometteurs et capables de relever des défis s’ils pouvaient éviter de tomber dans le piège de la médiocrité et de l’argent facile qui veut contrôler les générations montantes.

J’ai aussi constaté une grosse déception concernant les médias qui ont abandonné leur rôle d’informer, de sensibiliser et de cultiver, et qui à leur tour, sont tombés dans la tromperie et les règlements de comptes.

Pour être honnête, je dois aussi dire que parmi ceux que j’ai rencontrés, j’ai constaté beaucoup de loyauté et de gratitude pour la personne du Président pour ce qu’il a apporté durant plus de quinze ans à la tête de l’État. Et ce, malgré leur déception de voir qu’il n’a pas tenu toutes ses promesses politiques et est resté otage d’un groupe, qui use et abuse de chantage et de pillages et qui n’hésite pas à régler ses comptes à quiconque qui les contredit.

J’ai constaté de nombreuses choses que je préfère ne pas mentionner dans cette chronique afin d’éviter l’embarras et de ne pas amplifier le sentiment de désespoir. Car l’optimisme pour un avenir meilleur existe, même sans eux. L’espoir existe, tant que nous avons compris que la stabilité de l’Algérie n’est pas menacée par l’étranger comme aiment à le répéter certains partis politiques et certains médias.

La seule menace contre l’Algérie vient de l’intérieur. Elle vient de personnes qui ne pensent qu’à leur avenir politique au détriment du peuple qui est aujourd’hui conscient que la stabilité du pays ne repose pas sur des logements qu’on distribue aux nécessiteux, ni sur de nouveaux projets d’investissement pour les jeunes et des promesses pour plus de facilitations et de concessions.

[email protected]


Pour commenter nos articles, rendez-vous sur notre page Facebook,
en cliquant ici