La chronique de Benchicou : Si tu vas à Rio… El moumathil el ouahid lil arab

Ce fut au troisième but de Djabou contre la Corée du Sud que le commentateur de l’ENTV rappela au monde entier l’absolue supériorité du génie algérien : ces garçons, de Medhi Lacen à Aïssa Mandi, en passant par Sofiane Feghouli, Yacine Brahimi, M’Bolhi, Nabil Bentaleb ou Bouguerra, ont démontré au monde que l’Algérie de Bouteflika n’a nul besoin de Printemps arabe pour s’imposer comme le centre du monde arabe ! « El-Djazaïr, moumathil el ouahid lil arab ».

Et pour la seconde fois consécutive puisqu’en 2010 déjà, en Afrique du Sud, on arborait fièrement ce prestige en enrôlant de force sous une bannière arabe, eux qui auraient aimé jouer sous l’emblème du monde, d’un monde auquel ils veulent tant ressembler, le monde qui vient, pas celui, ancien et grabataire, des tyrans. Voilà donc quatre ans qu’ils répètent un mensonge dans l’espoir qu’il finisse par devenir vérité. Une imposture à la peau dure : ces joueurs, de Medhi Lacen né à Versailles à Aïssa Mandi natif de Châlons-en-Champagne, en passant par Sofiane Feghouli, enfant de Levallois-Perret, Yacine Brahimi né à Paris tout comme M’Bolhi, Nabil Bentaleb, enfant de Lille ou Bouguerra, né à Longvic, ne doivent rien à l’Algérie, ni leur talent ni leur carrière. Pour la plupart, ils ne parlent même pas l’arabe. Ils sont nés en France, ont appris le football en France et le pratiquent en Europe…

Mais la propagande d’État ne s’arrête pas à ces détails ! « El-Djazaïr, moumathil el ouahid lil arab » ! Des jeunes beurs au service d’une manipulation d’État ! Medhi Lacen, Aïssa Mandi, Sofiane Feghouli, Yacine Brahimi, Rais M’Bolhi, Nabil Bentaleb prennent le relais d’Antar Yahia, né à Mulhouse en Alsace, Hassan Yebda né à Saint-Maurice, (dans le Val-de-Marne), Karim Matmour, né à Strasbourg, Karim Ziani né à Sèvres (Hauts-de-Seine), Abdelkader Mohamed Ghezzal, né à Décines- Charpieu (Rhône), Nadir Belhadj, né à Saint- Claude dans le Jura, Rafik Djebbour, né à Grenoble, des joueurs de classe mondiale devenus des porte-drapeaux d’une compétition qui ne les concerne pas…

Je ne sais, du reste, ce qu’il faut représenter chez les Arabes, les peuples opprimés qui rêvent en silence d’une démocratie qui respecte ses droits et libertés ou ces fausses républiques où l’on ne quitte le pouvoir que pour le cimetière. Mais le temps d’un match, d’une Coupe du monde, vous oublierez que cent millions d’Arabes sont nés la même année que Barack Obama, cent millions d’Arabes sont nés en même temps que l’indépendance de leurs pays et aucun d’eux n’est président.

Le temps d’une Coupe du monde, vous oublierez qu’un demi-siècle a suffi pour abolir le racisme aux États-Unis d’Amérique, rétablir les Noirs dans leurs droits civiques et installer un Noir à la Maison Blanche, un demi-siècle a suffi pour que les Blancs cèdent la place, et qu’un demi-siècle n’a toujours pas suffi pour que nos vieux autocrates arabes cèdent la place. Il y avait l’Algérie des Aurès ; il y aura celle de  Porto Alegre !

Ce fut au troisième but de Djabou que le commentateur de l’ENTV rappela donc au monde entier l’usage diabolique que fait le système algérien de ces garçons, de Medhi Lacen à Aïssa Mandi, en passant par Sofiane Feghouli, Yacine Brahimi, M’Bolhi, Nabil Bentaleb ou Bouguerra, berbères nés en démocraties, athlètes de haute facture, mêlés à un match perdu d’avance, le match que s’obstine à jouer ce régime essoufflé, un de ceux qui, avec l’argent du pétrole, ont construit des mosquées pour abriter leurs mensonges et des prisons pour enfermer les consciences.


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