Reportage. Sur le chantier de Oued El Harrach, la future « Seine algérienne »

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Longtemps connu pour son odeur nauséabonde et sa pollution, Oued El Harrach commence petit à petit à se transformer en « Seine algérienne », comme l’appelle Kamel Boukricha, de la direction des ressources en eau d’Alger et qui dirige le projet de réhabilitation de Oued El Harrach. Longtemps fuit par tout le monde, cet endroit deviendra bientôt un lieu de détente et de loisirs. Piscines, stades, gazon et jardins prendront la place des ordures et des bidonvilles… Reportage sur le chantier de Oued El Harrach.

Un projet qui commence à voir le jour

Entamés en 2012, les travaux de réhabilitation de l’Oued commencent à donner des résultats. À l’embouchure de la rivière qui déverse sur la baie d’Alger à El Mohammadia, tout près de la future grande mosquée d’Alger, une très jolie placette est aménagée sur les berges de l’Oued. Du gazon, des palmiers. L’odeur de verdure vient nous chatouiller les narines dès l’entrée de l’oued. Juste à côté, plusieurs jolies tables en bois. Elles sont disposées ici pour que les gens puissent s’installer et admirer ce magnifique paysage. Plusieurs familles viennent se détendre ici, surtout le week-end. Et ils sont nombreux à fêter leurs anniversaires dans ce coin de verdure. « Qui aurait cru qu’on fêterait un jour son anniversaire à Oued El Harrach ! », en rit M. Boukricha, un peu tendu, toutefois.

gradin en face l'oued

C’est l’opération propreté autour de l’oued. Nettoyer, désincruster, replanter… La tâche est titanesque, mais les acteurs de cette transformation débordent de motivation. « Beaucoup de gens doutent du projet. On a entendu, à plusieurs fois, qu’il ne s’agit que d’un rêve », explique Zahira Kadi, en charge de la conduite et du suivi de l’aménagement de l’oued. Mais ce rêve commence doucement à prendre forme, à devenir réalité, au grand bonheur des Algérois, dépourvus de lieux de loisirs et de détente.

place ouverte au pblic

Tout près de cette placette, une bâtisse avec des façades blanches. « C’est un showroom », explique le chef de projet. À l’intérieur, des plans du projet, des images prises de l’oued rempli d’ordures. À côté, d’autres images montrent un oued tout à fait différent. Une belle destination touristique, beaucoup de verdure. Il s’agit évidemment de l’oued « avant et après » les travaux. Une salle de repos est également aménagée. Là, une petite bibliothèque sera installée. Une salle de photos où un film retraçant le projet de  l’aménagement de l’Oued sera projeté, une maquette du projet sera disponible aux visiteurs. « Actuellement, le showroom est fermé au public même s’il a été ouvert  plusieurs fois pour accueillir des écoliers », explique M. Boukricha.

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place de repos show room

intérieur du show room 3

En sortant de ce « mini musée », direction : le lit de l’Oued. Au bord, aucune ordure, aucune mauvaise odeur. L’eau est très claire. « D’ici 2016 aucune goutte d’eau polluée ne restera », promet M. Boukricha. Des gradins ont été montés pour pouvoir s’installer et contempler la zone. Plusieurs variétés de poissons seront introduites dans le fleuve. Au bord de l’Oued, deux pistes ont été prévues. Une pour les piétons et une piste cyclable. Elle s’allongera sur les 18km du projet. De l’autre côté, plusieurs engins faisant de nombreux allers-retours rappellent que les travaux sont toujours en cours. Trois piscines seront installées, des terrains de foot et de basketball seront montés. Un pont sera édifié pour relier les deux rives.

Un grand défi à relever

L’aménagement des aires se fait progressivement. « À chaque fois qu’une aire est achevée, nous l’ouvrons au grand public », assure M. Boukricha. Le travail avance bien même s’il reste beaucoup à accomplir. Mais, à ceux qui en viendraient à douter, le slogan de l’entreprise coréenne Daewoo qui réalise le projet avec Cosider, « It’s possible » (c’est possible) – rappelle qu’il faut garder espoir.

traveaux achevé

Pour que ce projet devienne réalité, Algériens et Coréens sont à pied d’œuvre. L’alliance Cosider-Daewoo a mobilisé 1 716 employés pour réaliser ce projet de 38 milliards de dinars. La livraison est prévue en 2015. Mais bien que Daewoo ait participé à l’aménagement d’un Oued pollué à Séoul, Oued El Harrach est un défi pour cette entreprise.

Tout comme pour Cosider dont c’est le premier projet du genre. Croisé sur la base de vie des Coréens, le responsable des études chez Daewoo, Choi Sunghhwan, avoue avoir été « choqué » lorsqu’il a vu, pour la première fois, l’état où se trouvait l’Oued. Comme dans chaque projet, plusieurs contraintes ont été rencontrées, avec notamment la présence des bidonvilles à proximité de Baraki et El Harrach. « Le relogement des gens de ces bidonvilles se fera le 15 juin », promet M. Boukricha. Choi Sunghwan, le responsable coréen, semble soulagé. Il avoue que ce problème le préoccupait beaucoup. Ce n’est d’ailleurs pas le seul problème rencontré sur place. Le chef de projet algérien regrette également le manque de main d’œuvre algérienne qualifiée. Ajouté aux mauvaises conditions météorologiques, les travaux peuvent rester au point mort pendant des mois.

bidon villes gué de canstantine 3

Des jardins à la place des bidonvilles

De la base de vie, nous nous dirigeons du côté de Baraki et Ben Talha, où le projet est en chantier. Après deux journées pluvieuses, le soleil réapparaît. Les dernières pluies orageuses ont laissé des traces. Les pistes sont boueuses et de nombreuses flaques d’eau se sont formées, rendant l’accès difficile au chantier. À bord d’une camionnette blanche, nous descendons l’Oued, de Baraki vers Ben Talha.

Autour du fleuve, les ordures sont encore très présentes. M. Boukricha nous explique que les gens continuent à jeter leurs ordures bien que le site soit nettoyé. Mais les bidonvilles seront bientôt rasés et remplacés par des jardins fleuris. Les gens pourront se balader librement ici. Par ailleurs, des stades, des passerelles et des ponts sont prévus. Et puisque l’endroit va connaître une seconde jeunesse, il deviendra également navigable. Des barques seront prévues pour que les visiteurs puissent se promener.

À en croire les responsables et ingénieurs travaillant sur place, Oued El Harrach sera d’ici décembre 2015 l’endroit le plus prisé et le plus branché d’Alger. Il deviendra une bouffée d’oxygène alors qu’il a été, pendant des années, une source de pollution et de désagrément. Une révolution !


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