La chronique de Hafid Derradji : entre hommes politiques, hommes du système et hommes d’État

Aujourd’hui en Algérie, on peut compter différentes classifications des politiques. Il y a les hommes politiques, les hommes du système et les hommes d’État. Tous tellement différents qu’ils ont produit un désordre dans les normes, les principes et les convictions. Ainsi, la politique chez nous s’est transformée en pratiques presque, portant atteinte à la pudeur adoptée sans la moindre honte, au vu et au su de tous les Algériens.  Ils usent de mensonges, de calomnies et de haine allant jusqu’à exclure tout antagoniste.

Par conséquent, les Algériens sont aujourd’hui blasés. Ils ont perdu toute confiance dans les politiques, y compris  ceux dévoués et convaincus par leurs idées. Il faut dire que les anciennes pratiques et celles qui prévalent encore aujourd’hui au sein du système ont établi cet état des choses, et le mot politique est aujourd’hui synonyme de manque de confiance qui touche même des hommes intègres et fidèles à leurs principes, qu’ils soient au sein du pouvoir ou dans l’opposition.

Aujourd’hui, l’Algérie patauge. Avec un nombre excessif d’hommes et de femmes pratiquant la politique dans différents partis, associations et organisations. Elle patauge aussi du fait du grand nombre d’hommes du système ; ces opportunistes et ces flatteurs connus pour leur dévouement au dirigeant du moment, avec comme idéologie « Le roi est mort, vive le roi ».

En revanche, des hommes d’État, on en compte peu.  C’est ce système et ces pratiques qui ont créé la médiocrité que nous subissons aujourd’hui. Une médiocrité implantée et nourrie par des provocateurs qui dominent la scène politique et qui tentent de s’approprier le nationalisme, l’amour de la patrie, les positions, les postes et les privilèges en excluant les autres.

Ils essaient ainsi d’avoir le monopole de la vie politique et de contrôler le futur des générations à venir, en usant de mensonges et de subterfuges et en manipulant l’opinion publique.

De nombreux hommes politiques et hommes du système se sont alliés délibérément ou inconsciemment contre les quelques hommes d’État. Tout comme ils se sont ligués contre le peuple sous le prétexte fallacieux de la stabilité, de la continuité et de la sécurité.  Ils ont misé sur les voleurs et les pilleurs et légalisé le pillage et la rapine oubliant les valeurs.

Alors, ils ont donné naissance à une classe politique incapable de distinguer entre les hommes et les pseudo-hommes, ceux qui parlent au nom de chaque période, au nom de chaque président alors que leur seul principe c’est « le koursi » et celui qui l’occupe. De ce fait, ils ont perdu toute crédibilité aux yeux du peuple qui ne leur fait plus confiance, et qui ne fait même plus confiance aux responsables de l’État, voire même à son pays et à ses institutions.

Le peuple ne veut même plus croire les quelques hommes intègres dont le seul tort est celui d’occuper des postes dans des institutions. Et avec toutes leurs bonnes intentions, la confiance du peuple a disparu, en raison des hommes du système.

Le pouvoir, les hommes politiques et les hommes du système sont les seuls responsables de l’échec des tentatives de renouvèlement des élites politiques, intellectuelles et sociales après toutes les crises que l’Algérie a connues. Ils sont responsables, car ils ont injurié les hommes d’État et ont exclu la nouvelle génération de la vie publique et au sein des partis politiques, des associations et des centres de responsabilités, au nom de la légitimité révolutionnaire et historique.

Ils considèrent que tous ceux qui sont nés après eux ne sont pas dignes de constituer une cellule de régénération. En revanche, ils n’hésitent aucunement à acheter la conscience des Algériens et à semer la peur du renouveau chez le peuple en appelant à la pérennité. Une pérennité dans le malheur, l’obscurantisme et la peur avec une grande dose de soupçon. Ainsi, les valeurs se sont perdues, l’économie s’est effondrée, la mauvaise gestion s’est installée et le pillage, la corruption, le régionalisme se sont répandus avec leurs graines de haine, d’exclusion et de vengeance.

Le système politique algérien a engendré des hommes qui aiment l’Algérie en échange de contreparties.  Des hommes qui s’accrochent à leurs postes quelles que soient les circonstances. En parallèle, il a produit la démission du peuple de la vie politique et associative. Une démission qui s’est traduite par le boycott des urnes par plus de 10 millions de citoyens lors de la  dernière élection présidentielle.

Malheureusement, il devient évident que ce système continuera à produire de la médiocrité politique qui conduira inévitablement à plus de désespoir et de pessimisme. Malgré toutes les tentatives de séduction et les concessions à l’égard du peuple et de l’opposition après les élections, à travers toutes les facilitations offertes au citoyen -qui en vérité lui reviennent de droit- toutes les propositions formulées par le pouvoir sont entachées de soupçons.

Ce pouvoir qui a brisé toutes formes d’ambition au cours des quinze dernières années. Il a cassé l’opposition et détruit les institutions de l’État avec la complicité des politiques et des hommes du système. Aujourd’hui, le peuple ne distingue plus celui qui construit de celui qui détruit. Aujourd’hui, les dirigeants savent pertinemment que nous savons qu’ils mentent et qu’ils portent atteinte à la Nation.

derradjih@gmail.com


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