Des caméras de surveillance de l’État contre les Smartphones des citoyens

L’État algérien a misé sur le tout sécuritaire. Après 10 années de lutte contre le terrorisme, il s’agissait, dans les années 2000, de prendre les devants. Les agents des renseignements avaient, pour bon nombre, la tâche de sonder la société, d’en détecter ses mouvances. Et ses potentiels dangers. Le monde avance et la technologie aussi. Les hommes ne suffisent plus. Les machines peuvent remplir des missions bien délicates.

Et alors que les grandes villes du pays s’embourbaient dans des circulations et des bouchons de voitures pour lesquelles les routes n’étaient pas dimensionnées, l’État a opté pour plus encore de sécurité. Il n’a pas installé de feux de signalisation mais placé des caméras de surveillance pour contrer le criminel, le prendre en flagrant délit ou en préparation de son forfait.  Des milliers de caméras de surveillance ont ainsi été installées dans la seule capitale. Elles ont été montées aussi vite et dans la même indifférence que le revêtement des trottoirs d’Alger, ces dernières semaines.

L’État a pointé du doigt les grandes capitales européennes et les villes américaines en réponse aux quelques détracteurs et défenseurs des libertés individuelles qui s’offusquaient. Ces derniers craignaient le contexte politico-religieux du moment : les caméras fleurissaient les poteaux urbains quand des non-jeûneurs se faisaient appréhender et juger par de consciencieux citoyens. Après Alger, Tizi Ouzou. On était en 2008. Toujours pas de feux de signalisation, mais des caméras de surveillance. « La Kabylie est infestée de terroristes », assène-t-on alors.

On était en 2009. Mais la technologie a cela d’extraordinaire qu’elle se démocratise.  Le citoyen a, lui, de son côté, troqué son téléphone version talkie-walkie pour un Samsung caméra intégrée. Des millions d’abonnés aujourd’hui au réseau mobile peuvent filmer. Surveiller. Et diffuser.  On dit que la vie trouve toujours un chemin, la technologie aussi. Aux caméras de surveillance dont personne n’a vu l’utilité en cas d’agression physique ou de vol de voiture, le citoyen a opté pour son propre film. Il devient caméraman, monteur et producteur pour palier l’aveuglement de ces enregistrements de la voie publique qui ne montrent rien.

Si les tribunaux lui sont boudés lorsqu’il est victime, le citoyen s’est trouvé une tribune, efficace : Youtube et Facebook. Que serait-il advenu de ces jeunes manifestants en Kabylie si quelqu’un du haut de son balcon n’avait pas filmé les scènes de lynchage ? Aurait-on diligenté une enquête ?


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