« Je ne suis pas contre l’exploitation du gaz de schiste »

abdelmadjid-menasra

Abdelmadjid Menasra est président du Front du changement (FC). Dans cet entretien, il s’exprime sur les initiatives de la CNLTD et son appel à une marche contre l’exploitation du gaz de schiste le 24 février.

La CNTLD a appelé à une marche contre l’exploitation du gaz de schiste. Quelle est votre position ?

Je ne suis pas contre l’exploitation du gaz de schiste. Du coté scientifique je suis convaincu que ce n’est pas nuisible pour l’environnement. Moi je suis contre la façon avec laquelle ce dossier a été traité.  Le problème à In Salah est que le pouvoir marginalise la population. Il aurait dû les convaincre d’abord avant de procéder à l’exploration ou à l’exploitation du gaz de schiste. Les habitants d’In Salah ont le droit à l’information. Le plus important aussi c’est qu’ils ont droit au respect. L’attitude du gouvernement reflète un manque de respect envers les citoyens alors qu’ils ne sont pas bêtes et ils savent bien quoi faire. De mon côté je soutiens nos frères à In Salah et je salue leur civisme. Les protestataires ont montré un haut niveau de culture et d’éthique en exprimant leurs revendications. D’ailleurs, ils défendent toute l’Algérie, pas uniquement In Salah.

L’opposition a-t-elle échoué ?

L’opposition est victime du système politique. C’est vrai que la Constitution de 1989 avait consacré le multipartisme mais malheureusement ses articles sont restés lettre morte. Sur le terrain, on constate que le pouvoir n’accorde aucun intérêt pour l’opposition. Le système politique algérien reste toujours un système basé sur le monopartisme. On n’a pas encore réussi à instaurer les principes de la transition démocratique. Le pouvoir mène des démarches contradictoires envers l’opposition. Dans les discours officiels il l’encourage mais réellement il fait tout pour la saboter. On ne doit pas accuser l’opposition et dire qu’elle a échoué car tout simplement elle subit beaucoup de pression. L’opposition algérienne n’a jamais eu l’opportunité qu’elle mérite. Elle attend toujours le moment opportun  pour recouvrir ses droits. Pour cela, lors de notre participation aux discussions autour de la révision de la Constitution nous avons proposé l’introduction d’articles qui protègent les droits de l’opposition.

Vous dites que l’opposition subit beaucoup de pression, pouvez-vous nous donner des illustrations?

Je vous donne un simple exemple : à chaque fois qu’on veut organiser une conférence ou une réunion, on doit obtenir d’abord l’accord des autorités. Je ne comprends pas pourquoi un parti agréé doit à chaque fois solliciter l’autorisation auprès des autorités.

D’autre part, réserver une salle est un autre volet de nos soucis. Les partis qui soutiennent le pouvoir n’ont aucun problème à propos de cela, mais les partis d’opposition souffrent pour réserver un lieu approprié pour se réunir. La majorité des salles appartiennent à l’Etat. En outre, elles sont excessivement chères, comme si le pouvoir faisait du business avec nous. Certains partis qui ont les moyens financiers pour louer une salle préfèrent se réunir en dehors de la capitale où les hôtels sont moins chers. Interdire les partis politiques d’exercer leurs activités n’a aucun lien avec les principes démocratiques.

On dit que l’opposition est le miroir du pouvoir…

Je suis tout à fait d’accord mais malheureusement notre système politique est inconscient. Il ne sait pas qu’il est en train de porter préjudice aux principes démocratiques de la République Algérienne. Dans les États développés c’est absolument la réalité. L’opposition est considérée comme le miroir qui reflète les défauts du système politique, en permettant à ce dernier de se corriger. Chez nous on est loin de cela. Notre pouvoir politique ne reconnait pas l’opposition. Il fait toujours de son mieux pour la marginaliser et la mettre à l’écart de la scène politique. Malheureusement, il n’est pas assez mûr pour traiter l’opposition comme son miroir.

Plusieurs initiatives ont été lancées par l’opposition. Qu’est-ce que vous en pensez ?

La vision du Front du changement est un peu différente par rapport aux autres partis. On ne se mêle pas des activités des autres. Pour nous, toute initiative est la bienvenue, à condition qu’elle apporte un plus pour notre pays. Le dialogue consensuel est la devise de notre parti. Je suis étonné d’entendre certains critiquer les intentions des autres. Nous étions les premiers à appeler à une conférence de consensus national bien avant le FFS. Quand nous avons reçu la proposition de ce dernier, nous l’avons acceptée avec plaisir et sans condition car elle reflète nos principes. Même au sein de la coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) nous avons toujours évoqué ce point-là. Comment faire une transition sans donner la parole au pouvoir ?

En outre, l’initiative d’Abderrazek Mokri, président du MSP,  mérite d’être évaluée. Je ne comprends pas pourquoi il a été autant critiqué? Il a juste donné son avis en proposant une initiative que lui-même trouve adéquate. C’est son droit légitime. Pour cela il ne faut pas accuser les uns et les autres. Il faut donner la parole à tout le monde.

Je pense qu’il est temps de réunir toutes ces initiatives. Il est temps de se réunir tous autour de la même table car aucun parti ne pourra prétendre dépasser la crise actuelle à lui-même seul.


Pour commenter nos articles, rendez-vous sur notre page Facebook,
en cliquant ici