Les polémiques liées à l’histoire peuvent-elles être réglées dans les tribunaux ?

Photo page facebook de Mohamed Arezki Ferrad

Mohamed Arezki Ferrad est historien. Il revient dans cet entretien sur les propos de Saïd Sadi concernant Messali Hadj.

Quelle est votre réaction face aux propos de Saïd Sadi sur Messali Hadj?

Pour commencer, il faut absolument respecter la liberté d’expression de chacun. Mais en même temps l’histoire ne devrait être écrite que par les historiens. Ce qui ne veut pas dire qu’ils doivent avoir le monopole sur l’histoire. Même si l’écriture académique et officielle reste du ressort de l’historien, d’autres, dont les politiciens, peuvent apporter leur propre lecture. Cela est parfaitement acceptable parce que ça reste une contribution, qui peut être parfois valable, pour l’écriture de l’histoire.

Pour revenir à Messali Hadj. Il est indéniable qu’il a grandement contribué dans l’histoire de l’Algérie. Il a été le fondement même du Mouvement national entre 1926 et 1953. Il est inacceptable, pour moi, en tant qu’historien que cette personnalité soit accusée de trahison.

Êtes-vous favorable aux poursuites judiciaires engagées contre M. Sadi ?

Les différends liés à l’histoire ne peuvent pas être réglés dans les tribunaux. C’est l’affaire des académiciens. Je me sens navré de voir ce qui se passe. Car, dans un État qui se veut démocratique, on ne devrait pas réprimer un homme à cause de ses propos, simplement parce qu’il a contesté l’histoire à travers un livre. Logiquement, la réponse aurait dû être à travers un autre livre. Je me sens vraiment désolé de voir qu’encore aujourd’hui, la réponse à l’intellect se fait par la répression. Le livre, quelle que soit la nature de son engagement, doit être respecté.

Ne pensez-vous pas nécessaire de réécrire une partie de notre histoire ?

Oui, certainement ! Il y a des tentatives, essentiellement concernant la guerre de l’indépendance. Il y a des centaines de travaux académiques qui traitent de ce sujet. Malheureusement ces travaux ne trouvent aucun moyen d’être publiés. Nous vivons, aussi, une époque où on a besoin des mémoires des anciens moudjahidine et autres témoins de l’histoire. Ceci peut représenter une matière première pour l’historien, même si l’écriture historique est très dure car elle demande une grande objectivité.


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