La chronique de Hafid Derradji. Le Président nous a dupés

Hafid Derradji

Les analystes qui suivent la politique de Bouteflika, dans sa gestion des différents dossiers ayant trait à ses partisans, ses détracteurs ou tout autre aspect lié au pays depuis ces quinze dernières années, s’accordent à dire que l’homme pratique la ruse à merveille et dans tous les domaines. On le voit dans ses promesses de révision de la Constitution faite avant la présidentielle ou le transfert du pouvoir à une nouvelle génération qui s’appuiera sur la légitimité populaire et non plus sur l’histoire ou la révolution….

Certains pourraient dire que ce n’est pas nouveau, que Bouteflika est connu pour sa ruse depuis l’indépendance, mais on ne pouvait prédire la tromperie du peuple et des institutions de la République. L’homme a même dupé ses alliés tels Ahmed Benbitour, Ali Benflis, Belkhadem, Bachir Boumaza, Krim Benyounes et d’autres. Cela prouve que l’homme n’a ni foi ni loi, qu’il se projette comme le seul ayant droit de l’Algérie car c’est à lui seul que revient le mérite de la paix et de la sécurité et c’est grâce à lui que les prix du pétrole ont pris leur envol, que la pluie qui nourrit les terres n’est due qu’à sa baraka… Encore plus loin, les réserves n’ont atteint ce niveau que grâce à lui et l’équipe algérienne n’aurait jamais pu se qualifier au Mondial deux fois de suite sans sa bénédiction !

Bouteflika nous a menti en 1999 lorsqu’il s’est attribué le succès du projet de la Réconciliation nationale et le rétablissement de la paix et de la sécurité. Il a usurpé la place de ceux et celles qui se sont battus et ont résisté devant les affres du terrorisme et sont morts pour défendre la République. Bouteflika a poussé la supercherie jusqu’à son comble en affirmant aux médias français que lui seul était l’Algérie et nul autre ne pouvait ni parler ni décider à sa place.

Le Président nous a leurrés lorsqu’il nous a promis lors de ses innombrables sorties un honneur et une fierté qui se sont vite avérés être synonyme de néant et de disgrâce. Ce même mal pousse nos jeunes vers la mer qui les voit partir s’échouer, morts, sur d’autres rives. Nos jeunes continuent à mourir à Ouargla et Ghardaïa pour exiger leurs droits d’avoir une vie décente. Bouteflika s’est moqué de nous lorsqu’il nous a promis la justice sociale alors que nous butons chaque jour devant des inégalités sociales insupportables entre les riches et le peuple qui s’appauvrit sans cesse.

Bouteflika nous a dupés lorsqu’il nous a promis une réhabilitation de l’Algérie et un développement économique national. Or, le rôle de l’Algérie régresse diplomatiquement. La voix de l’Algérie reste éteinte et muette au sein des institutions internationales et notre économie demeure ligotée aux hydrocarbures et c’est le peuple qui subira les répercussions de la chute des prix du pétrole. Nous ne serons jamais apte à être des créateurs de richesses, à améliorer les services alors que les scandales impunis de corruption et de malversations minent le cercle rapproché qui, du jour au lendemain, s’est vu à la tête d’une richesse colossale sans que la justice ne daigne enquêter ou lever le petit doigt !

Bouteflika ne s’est pas arrêté là, il est même allé plus loin en 2008 en révisant la Constitution pour supprimer la limitation des mandats. Bouteflika nous a de nouveau bernés en 2009 quand il s’est adressé à nous en disant : « Tab Djenani ». L’ère de la légitimité révolutionnaire et historique s’en est allé pour un quatrième mandat sur une chaise roulante alors qu’il nous avait promis une révision de la Constitution juste après les élections présidentielles. Il n’a jamais pu tenir ses engagements car il est la proie de son entourage qui persiste à s’agripper au pouvoir quel que soit le prix de la misère et du désarroi social.

Le Président a dupé par la suite l’institution militaire qu’il a brimée et menacée tout en démantelant ses assises en préparation de la destruction de l’État et son ébranlement pour rester seul au pouvoir. Il mystifie également le Conseil constitutionnel, l’Assemblée populaire nationale et le Conseil de la Nation et toute autre institution de la République qu’il voulait, non plus au service du Peuple, mais à ses bottes pour assurer sa succession et celle de son cercle. Pour que l’Algérie reste otage d’un groupe impitoyable et sans scrupule.

L’histoire sera au rendez-vous quand le peuple fera des découvertes atroces qui portent sur l’ère Bouteflika, et là, on oubliera bien vite les réalisations et les réussites de son mandat que seuls les ingrats et les perfides peuvent nier.

derradjih@gmail.com


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