Les opérateurs économiques sont désormais tenus de garantir les biens et les services livrés aux consommateurs, en vertu des dispositions d’un décret exécutif entré en vigueur le 3 octobre 2014, a annoncé le ministère de Commerce sur son site web. Cette loi est-elle respectée par les commerçants ? Afin de pouvoir y répondre, nous avons fait, ce lundi 6 octobre, un tour au grand marché d’El Hamiz, fief de l’électroménager à Alger.
« Mais de quelle loi parlez-vous ? »
Les commerçants d’El Hamiz n’ont pas entendu parler d’une loi qui les oblige à fournir une garantie à leurs clients. « J’en ai pas entendu parler et de toute façon nous ne sommes pas concernés », lance le propriétaire de l’un des magasins. «On vend ce que l’on reçoit. Si le produit est sous garantie on le vend avec une garantie mais si le produit n’a aucune garantie c’est au client de décider et d’en assumer les conséquences », dit-il fermement. Un jeune vendeur, ne se sent pas concerné par cette nouvelle réglementation dont il n’a pas entendu parler. « Cela ne nous concerne pas. Si l’importateur nous donne des garanties on n’a pas de problème à les donner aux clients », dit-t-il.
Commerçants et importateurs, à qui la faute ?
Dans la petite boutique, du jeune vendeur, on trouve toutes sortes d’électroménagers. Les sèche-cheveux ont une garantie d’un an. Les fers à repasser par contre ne sont pas sous garantie. Pourquoi ? « Les importateurs ne nous garantissent pas le produit car les marques importées n’ont aucune maison en Algérie », explique-t-il. Comment faire alors en cas de problèmes. « Il n’y aura pas de problème ce sont des produits d’origine. Il n’y a rien à craindre », tente-t-il de nous rassurer.
Chez les importateurs le discours est différent. Nous avons contacté un importateur de la marque japonaise « Kenwood ». « Nous sommes un importateur agréé. Tous les produits sont sous garantie », explique-t-il. « Nous avons des agents agréés dans toutes les wilayas du pays où des pièces de rechange sont disponibles », atteste-t-il. Selon l’importateur, certains commerçant qui veulent avoir « du bénéfice au dépend des clients » préfèrent acheter chez des importateurs qui travaillent informellement. « Il est clair que si le produit vient de l’informel aucune garantie ne peut être fournie », juge-t-il.
Á quoi sert cette loi face à l’informel ?
L’informel est une réalité à laquelle on fait face, notamment lorsqu’il s’agit d’électroménager. Á quoi sert donc une telle loi dans une économie gangrénée par l’informel ?
Mustapha Zebdi, président de l’Association des consommateurs (Apoce), explique que « l’informel n’a jamais garanti au consommateur ses droits. Cette loi ne s’applique que sur les opérateurs économiques qui ont un registre de commerce » précise-t-il. Il salue cette initiative qui « conforte les intérêts du consommateur », mais reste réservé. « Nous ne pourrons pas juger avant d’avoir vu les résultats », indique-t-il.
Pour l’un des consommateurs à El Hamiz. « Cette loi ne peut pas être appliquée. Avant d’exiger de donner des factures ou des garanties aux clients il faudrait d’abord qu’ils s’attaquent aux importateurs informels qui dictent, véritablement, la loi du marché », lance-t-il avec le sourire. « Je ne pense pas qu’il le feront », conclut-il.