REPORTAGE. Akbou, ville prometteuse mais entravée

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À 60 km à l’ouest de Béjaïa se trouve Akbou, une cité de 60 000 habitants à l’industrie florissante où les plus grandes entreprises (Soumam, Danone, Général emballage…) possèdent leur enseigne. Mais elle n’est pas à la hauteur de ce qu’on devrait attendre d’elle. Ici, on ne se croirait pas dans la 23e ville en matière de ressources, une ville au budget de 10 milliards de dinars, selon nos confrères de Jeune Afrique. Contacté pour plus de précisions sur les dépenses de fonctionnement, le maire n’a pas donné suite à nos appels.

À la gare, le manque d’infrastructures saute aux yeux. Une gare en lambeaux. Il faut pratiquement sauter du train pour parvenir au sol. Aucun aménagement pour favoriser le transit aux personnes dans cette zone qui participe très activement à l’enrichissement du pays.

En faisant quelques kilomètres dans la ville, nous nous apercevons d’un problème encore plus grand. La circulation. Véritable casse-tête pour les automobilistes. Actuellement, la route nationale 26 qui relie notamment la ville à Béjaïa – et qui est l’un des axes de circulation majeurs pour traverser la ville – est engorgée du matin au soir. Plus de 18 000 véhicules l’empruntent quotidiennement.

Directeur des exportations à Général Emballage, numéro 1 sur le carton ondulé qui emploie 1 000 personnes et réalise 7 milliards de dinars de chiffre d’affaire, Mohamed Bessa ne peut que constater les dégâts : « On importe tout notre papier via le port de Béjaïa. Et nos pertes en matière de logistique sont immenses. » Poste majeur de dépenses pour cette entreprise, la consommation de carburant est également un gros point noir. « Le prix de l’essence nous revient aux tarifs que l’on peut voir en France. Car si un camion fait 60 km en trois heures, sa consommation devient énorme », précise-t-il.

Les infrastructures ne suivent pas

Lancé en grande pompe le 27 avril 2013 par le Premier ministre Abdelmalek Sellal, le projet d’une pénétrante autoroutière de deux fois trois voies doit en principe être réalisé en trois ans. Ce chantier doit s’étendre de Béjaïa à Bouira. Mais de nombreux problèmes rendent le délai de livraison incertain. Plusieurs habitants refusent notamment de vendre leurs terrains à un prix jugé trop faible.

Par ailleurs, une autre pratique empêche l’industrie de fleurir comme elle le pourrait. Le phénomène de fermeture des routes par des manifestants. Seuls, ils décident de barrer une route car ils s’estiment lésés sur tel ou tel aspect de la vie courante. « Récemment, on a eu des semi-remorques bloqués à Tazmalt (ouest d’Akbou). La route était fermée par un particulier », raconte Lounis Hamitouche, le patron de Soumam.

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Lounis Hamitouche, patron de la Soummam

Cette laiterie est particulièrement sensible au phénomène puisque le lait qu’elle produit doit être traité 24 heures après son extraction, sous peine de devenir impropre à la consommation. « Parfois, il faut 9 heures de route lorsqu’on va chercher le lait à 600 km chez des producteurs près de la frontière tunisienne. Le lait reste parfois bloqué 15 heures sur la route. Et il est perdu. »

Aux problèmes d’acheminement des marchandises s’ajoute celui de la ponctualité des employés, handicapés par des routes toujours plus engorgées. « On demande à l’État de régler ces problèmes. On souffre beaucoup. Et chaque année, ce sont des milliards de dinars que nos entreprises perdent », résume Lounis Hammitouche.

Des entrepreneurs attachés à Akbou

Mais ces entrepreneurs sont attachés à « leur » région et ils n’envisagent absolument pas de quitter les lieux. Emblème de ces enfants du pays, le patron de la Soummam est parti tenter l’aventure à Alger à 23 ans, en stop et avec 50 dinars en poche. L’homme a connu des succès et des échecs dans la capitale. Mais il a finalement décidé de revenir pour lancer sa véritable activité. Et il ne veut pas quitter cette belle région malgré tous ses problèmes.

« On a commencé ici, je suis né là, c’est impossible pour moi de retourner à Alger », explique-t-il. Et de toute manière, il serait très compliqué pour lui aujourd’hui d’avoir les mêmes avantages qu’à Akbou. « Il n’y aura jamais de terrain disponible, pas de main d’œuvre. Ici, nous utilisons un grand réseau d’employés locaux », admet-il.

Également très attachée à Akbou, la famille Batouche compte justement sur sa force locale pour faire avancer le dossier des infrastructures. Présente notamment dans les fruits, les jus, la conserve de viande, le transport, le béton, l’emballage, elle est très implantée. « Je viens d’ici, c’est important pour moi de participer au développement. Je ne veux pas du tout partir », sourit Boussad Batouche, le patron d’Elafruits.

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Boussad Batouche, patron d’Elafruits d’Akbou


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