Les malades algériens victimes du commerce de la santé

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Hôpital public ou clinique privée ? Pour se soigner, les Algériens n’ont souvent pas le choix. De nombreux malades sont victimes du commerce de la santé. Ils se rendent dans les hôpitaux publics pour se soigner et se retrouvent réorientés par leurs médecins-traitants vers des cliniques privées. Et souvent, les malades sont surpris de voir leur médecin du public à la clinique privée. Témoignages contre des pratiques devenues courantes.

Arnaque

« Ma mère est alitée depuis plus d’un mois et je l’ai emmenée dans un hôpital public. Son médecin me donne rendez-vous pour lui faire des examens au sein de l’hôpital », raconte Saïd. « Je repars le jour du rendez-vous pour le voir, on me dit qu’il est en congé mais que je pouvais le retrouver dans une clinique privée. Je me rends à cette dernière, je retrouve ce médecin qui me propose d’hospitaliser ma mère pour une nuit afin d’effectuer quelques examens nécessaires (disponibles à l’hôpital public). Et là, il me facture juste l’hébergement à 30 000 DA », raconte le sexagénaire, dépité. « Il m’a ensuite proposé de la garder encore une nuit, mais j’ai refusé. J’ai senti que je me suis fait arnaquer », a-t-il ajouté.

Des examens pour rien

Linda, une jeune enseignante, raconte son histoire. « J’ai fait une consultation au service gynécologie d’un hôpital public, le médecin m’a dit que j’avais un kyste et que cela pouvait être un cancer. Il m’a envoyée vers une clinique privée pour faire quelques radios et analyses. J’ai appris par la suite que ce médecin travaillait dans cette clinique », dit-elle. « À la fin, c’était un simple kyste qui ne méritait pas tant d’examens sur lesquels j’ai dépensé une petite fortune », témoigne-t-elle.

La loi autorise l’activité complémentaire

Saïd et Linda ne sont pas les seules personnes à avoir subi ce sort. Mais ils auraient pu échapper à cette situation si la loi n’autorisait pas « l’activité complémentaire » pour les médecins spécialistes. L’article 4 de la loi relative à la protection et à la promotion de la santé permet aux médecins spécialistes de travailler dans le secteur public et privé. « Les corps des spécialistes hospitalo-universitaires, exerçant dans le secteur public, en qualité de professeur, maître-assistant, justifiant 5 années d’exercice effectif en cette qualité ou titulaire d’un diplôme de Doctorat d’État en sciences médicales (DESM), et des spécialistes de santé publique justifiant 5 années d’exercice effectif en cette qualité, sont autorisés à exercer une activité complémentaire (…) en dehors des établissements de santé publique », selon l’article.

Détournement des patients

Les syndicats de la santé avaient récemment remis au ministère de la Santé des recommandations pour la nouvelle loi sanitaire. Parmi lesquelles figure la suppression de l’article lié à l’activité complémentaire. Mais le nouveau projet de loi formulé par le gouvernement n’a pas pris en considération cette proposition. L’activité complémentaire est toujours autorisée.

Pour le Dr Mohamed Bekkat Berkani, président de l’Ordre national des médecins, le médecin doit travailler soit dans le public, soit dans le privé. « Il faut supprimer cette activité complémentaire qui a montré toutes ses limites », insiste-t-il. Concernant les médecins qui orientent leurs patients vers les cliniques privées où ils travaillent, il indique que « la loi interdit le détournement des patients, mais le ministère de la Santé doit sévir et confier le contrôle de ces activités à des inspections ».


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