Chaque année, la Russie accueille près de 200 étudiants algériens, selon le Centre de recherches sociologiques du ministère de l’Education et de la Science russe. Un chiffre modeste par rapport à la France qui attire chaque année, 5000 étudiants d’Algérie, mais qui fait de la Russie l’une des principales destinations des étudiants algériens. Pourquoi ? Tout d’abord, les meilleures universités russes – l’Université d’État Lomonossov de Moscou en tête – figurent dans le top-100 du classement de Shanghai qui répertorie les établissements d’éducation supérieure les plus performants. L’Université des relations internationales (MGIMO) est également très prisée par les élites russes qui se destinent aux carrières diplomatiques. Beaucoup d’Algériens tentent donc également leurs chances en Russie, d’autant qu’au-delà de la notoriété mondiale des programmes éducatifs d’ingénieur et d’informaticien, aussi bien que ceux des écoles de sciences exactes, des raisons plus pragmatiques entrent également en compte.
Des études moins chères
« Faire ses études en Russie est beaucoup moins cher qu’en Europe », partage avec TSA, Mohamed Trabelsi, étudiant algérien de l’Ecole des mines de Saint-Pétersbourg depuis 2009. « Ma mère est russe et donc je n’ai pas à payer les études, mais seulement le foyer étudiant dont le prix varie de 50 à 250 dollars en fonction du niveau du confort de la chambre ».
« Cette raison est la première pour les jeunes Algériens dans leur voie pour la Russie », affirme le directeur adjoint des recherches scientifiques au Centre de recherches sociologiques du ministère de l’Education et de la Science Alexandre Arefiev. Il relève que le prix moyen des études dans une université russe est de 3 600 dollars, soit 5 ou 6 fois moins qu’en Europe ou aux Etats-Unis.
« Par souci d’économie les jeunes Algériens choisissent parfois de passer leur licence en Russie pour obtenir ensuite leur master dans un pays européen tel que la France » explique Alexandre Arefiev.
C’est notamment le cas des études de médecine qui se retrouvent être les plus populaires chez les jeunes étudiants algériens en Russie. Plus de 31% d’eux entrent dans les facultés de pharmaceutique.
Les deux autres grands choix privilégiés sont les études d’ingénieurs (24%) et d’économie et management (15%).
La popularité de ces spécialités s’explique, entre autres, par un concours très difficile pour rentrer dans les facultés homologues en Algérie même, selon le chercheur. Surtout que Moscou et Alger ont un accord concernant la reconnaissance mutuelle des diplômes et des grades universitaires et que les étudiants n’auront de difficultés ni pour rentrer dans ces universités russes ni faire carrière lors de leur retour en Algérie. Parmi les 65 établissements d’enseignement supérieur où les Algériens suivent actuellement leurs études, les plus populaires sont l’Université d’État de Nijni Novgorod et l’Université d’État de médecine I.P.Pavlov de Riazan.
Coopération historique
On peut également chercher les origines de cet engouement dans l’histoire des relations russo-algériennes. De 1956 à 1991, Plus de 4 000 officiers supérieurs de l’Armée populaire algérienne, ainsi que 4 000 cadres civils d’Algérie – ingénieurs et médecins – ont suivi leurs études dans des établissements d’enseignement supérieur de l’Union Soviétique, selon l’Association nationale des diplômés des universités et instituts de la Russie et autres républiques de la CEI.
De tels chiffres s’expliquaient alors par une forte coopération économique et militaire entre les deux pays et la nécessité de former en Algérie des cadres nationaux capables de travailler avec l’armement et les technologies soviétiques importées. Pourtant, malgré la chute de l’URSS et la coupure des liens de Moscou avec l’Algérie aussi bien qu’avec beaucoup de ses anciens partenaires et alliés, les universités russes attirent toujours les étudiants algériens.
L’Algérie, grand importateur d’armes russes
Les relations étroites entre les deux pays, héritage de l’époque soviétique, continuent de jouer un rôle important. Comme le démontre l’agence de presse russe Novosti, l’Algérie est aujourd’hui le deuxième plus grand importateur d’armes russes: en 2013 elle a acquis des armes et du matériel militaire pour une valeur de 1,9 milliards de dollars. D’où la formation de dizaines d’aviateurs et de tankistes algériens chaque année en Russie.
En outre, Moscou et Alger continuent de développer d’autres axes de coopération comme leur partenariat dans le domaine de l’énergie nucléaire. L’accord qui prévoit la construction de la première centrale nucléaire en Algérie, à l’aide de la Russie, vient d’être signé le 3 septembre.
Une coopération aussi étroite que sous l’URSS nécessite un partage d’expérience, et donc de nombreux programmes intergouvernementaux dans l’éducation qui prévoient l’envoi d’étudiants algériens dans les établissements d’éducation supérieure russes. Par exemple cette année, dix spécialistes algériens de l’énergie nucléaire seront formés à l’université nationale nucléaire de recherche « MIFI » de Moscou.
Dans ce contexte général, Moscou essaie de faciliter encore plus leurs études. Notamment, ces dernières années, la Russie a accordé plus de 10 000 bourses par an pour les étudiants étrangers dont 9% en moyenne pour les ressortissants du Maghreb. Cette année Moscou a augmenté ce nombre jusqu’à 15 000.
En outre, les universités russes lancent actuellement de nouveaux programmes d’études en langues étrangères. Par exemple, les étudiants d’Algérie peuvent déjà apprendre la médecine en français à la Première université de médecine d’État de Moscou et à l’Université russe de l’amitié des peuples.
Enfin, lors de sa visite en Algérie en mai 2014,de la présidente du Conseil de la Fédération, Valentina Matviyenko avait évoqué des projets visant à faire renaître le rôle important du système éducatif soviétique pour les Algériens. L’un d’entre eux serait d’ouvrir des filiales d’universités russes en Algérie.