La chronique de Hafid Derradji : plus royalistes que le roi

Plus royalistes que le roi, une expression dont on use pour ironiser sur ces personnes qui défendent le dirigeant plus qu’il ne l’aurait fait pour lui-même. Elle décrit ceux qui justifient les décisions et les positions de l’administration même lorsque celles-ci sont mauvaises et erronées.

C’est une expression qui s’applique très bien à certains Algériens qui profitent d’un statu quo qui prévaut dans certains milieux.  Ceux-là même qui font promotion de la stabilité dans la continuité et de la bonne gouvernance et qui défendent les choix politiques, économiques et sociaux bien plus que leurs instigateurs et sans la moindre conviction. Vous les verrez aux premiers rangs applaudissant et soutenant le système et ses hommes de peur de se retrouver exclus ou punis, et pour avoir plus de privilèges.

Ce qui se produit en Algérie, comme appropriation du pouvoir, tyrannie, arbitraire, négligence, échec et propagation de la peur à plusieurs niveaux n’est aucunement le fruit de la force, de la sagesse et de l’influence du Président et de son entourage proche. C’est plutôt le fruit de ceux qui l’applaudissent et le plébiscitent à tous les niveaux. Ceux qui crient « vive le roi »  et défendent ses choix sans conviction.  Mais pas que ; ils répandent le mensonge et les rumeurs, l’appréhension de la punition et l’exclusion et la peur du changement et ce qu’il pourrait avoir comme répercutions sur leurs intérêts et profits.

Ces personnes s’affichent lors des grands rendez-vous politiques et dans les tribunes médiatiques avec leur arsenal de propagande pour vendre un projet auquel ils ne croient pas. Ils défendent un quatrième et un cinquième mandat, et pourraient même demain plaider pour l’hérédité du pouvoir afin de garantir la continuité  et la stabilité du pays comme ils le prétendent. Alors que c’est la continuité du vol et du pillage, de la corruption et du déclin dans tous les secteurs.

Ces personnes guettent tous ceux qui ne partagent pas leurs opinions et les combattent bien plus que ne ferait le dirigeant lui-même. Le dirigeant ignore peut-être leurs pratiques, et n’approuve pas l’oppression et l’injustice de ses partisans à l’égard des citoyens à travers des opportunistes qui n’hésitent pas à utiliser tous les moyens pour porter atteinte au Président d’abord, puis au peuple.

Et ces personnes seront aux premiers rangs quand mourira le roi.  Ils n’hésiteront pas alors à se retourner contre lui et à le renier et à remettre en question ses politiques et ses décisions, comme c’est le cas dans les milieux où règnent la médiocrité et le sous-développement, où on ne croit pas à l’opinion de l’autre.

Ce sont des personnes qui usent de toutes les formes de tyrannie, notamment celle de l’ignorance sur le savoir et la tyrannie du moi sur l’esprit tel que relaté par le penseur Abderrahmane El Kaouakibi, dans son livre « Les natures de la tyrannie », et ceci est la forme la plus rigide et la plus dangereuse de la tyrannie.

Je dois rappeler que mes propos ne concernent aucunement les personnes persuadées et convaincues par la personne du Président, par son projet et ses capacités pour diriger le pays.  Je ne fais pas référence à ceux qui croient en Bouteflika et le soutiennent avec certitude. Je parle de ceux qui mangent à tous les râteliers et soutiennent ceux qui sont debout, tant qu’ils restent debout pour se maintenir et préserver leurs intérêts. Ainsi, ils sont prêts à signer un pacte avec le diable afin de maintenir le sous-développement et la médiocrité qui ne sied pas à un pays de la taille de l’Algérie

Tous les régimes autoritaires à travers l’histoire sont ainsi faits. Ils ne se basent pas sur la force des dirigeants et des hommes d’État, mais sur les opportunistes et les partisans qui défendent le roi plus que le roi lui-même dans le seul but de préserver leurs intérêts et leurs acquis.

Ces personnes sont la plus grande menace pour l’Algérie aujourd’hui. Ce sont des forces du mal qui ne se sont là que pour planifier leur maintien au pouvoir afin de faire oublier leurs échecs et sauvegarder leurs intérêts même au prix de la morale et des valeurs. D’ailleurs, ils n’hésitent pas à porter préjudice à la réputation de l’Algérie, à détruire les institutions politiques et économiques et à affecter le prestige de l’État en laissant se répandre la corruption, le crime et le chaos à tous les niveaux.

Pour tout cela, ces royalistes qui se placent à la place du roi sont le plus dangereux fléau qui affecte l‘Algérie.  Ceux-là même seront les premiers demain à crier « le roi est mort, vive le roi », même si le peuple devait mourir de malheur et de tristesse.

derradjih@gmail.com

 


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