Vu de Paris : quand un ministre français revendique ses origines algériennes dans un gouvernement dirigé par un supporter du Barça

Il se passe quelque chose au royaume de France. La formule a déjà beaucoup servi mais, depuis mardi dernier, la France est assurément gouvernée différemment. Un nouveau Premier ministre, Manuel Valls, d’origine espagnole et naturalisé Français à 18 ans, est en fonction.

Celui qui incarne l’aile droite de la majorité présidentielle et une forme de professionnalisme dans l’action qui rappelle la posture de Nicolas Sarkozy. Pour son premier déplacement sur le terrain, il a choisi en banlieue parisienne, le site industriel du géant français EADS, manière de montrer qu’il est à ce poste pour booster l’emploi et favoriser les avantages compétitifs hexagonaux. À ses côtés, lors de cette visite, Najat Vallaud-Belkacem, la ministre des Droits des femmes, de la Ville et de la jeunesse et des sports, d’origine marocaine et Arnaud Montebourg le nouveau ministre de l’Économie. Ce dernier est, tout comme Manuel Valls, un animal politique, dont la cote vient de monter singulièrement.

Montebourg incarne l’aile gauche du gouvernement. Il a longtemps plaidé pour un changement de politique au niveau européen. Favorable au protectionnisme et à la démondialisation, il représente une voix forte et jeune dans ce gouvernement. Avocat de métier, il a le verbe haut et d’aucuns le traiteront d’arrogant quand lui prétendra être juste une force en marche. Invité de la radio Beur FM, il y a quelques jours, il a été interrogé sur ses liens avec l’Algérie.

Il a ainsi fait une longue confession reprise par le site Oumma.com : « D’ailleurs, moi-même j’ai quelques origines (…) algériennes. C’est un peu mon deuxième pays. Pourquoi ? Parce que mon grand-père (…) était Algérien. Un Arabe, pas un pied-noir, un Arabe… Il faut dire les choses. (…) Il a porté en 39-45 l’uniforme français et combattu pour la France, et puis après, pendant la guerre d’Algérie, il était du côté du FLN. (…) C’est-à-dire, qu’il a finalement été l’un de ceux qui (…) se sont battus pour la décolonisation. Et bien, cette décolonisation aujourd’hui n’est pas soldée ; c’est-à-dire, qu’aujourd’hui vous avez des Français qui n’acceptent pas la vision qu’on donne de cette histoire-là. Il serait temps, je crois, de la mettre dans le patrimoine politique, culturel et même psychologique commun. Ça fait partie un peu des leçons que j’ai tirées de ma propre histoire personnelle, qui est l’histoire d’une rencontre entre un Algérien égaré dans le Morvan et une famille de bouchers-charcutiers du côté de mon père. Dans notre famille, on se surnomme les Arabo-morvandiaux. C’est en tout cas mon histoire et j’en suis très fier parce que c’est une richesse, une force. Et il y a des millions de Français comme ça. La France n’est pas une nation ethnique, c’est une nation contractuelle ».

Assurément, cela fait plaisir dans le climat que connait la France d’aujourd’hui d’avoir un représentant, à haut niveau de l’État, qui ose revendiquer des origines maghrébines et les évoquer sans crainte.

Il faut, dans la même veine, relever l’émotion du Premier ministre Manuel Valls, quand, à la tribune de l’Assemblée nationale, en prononçant son discours de politique générale, il a lâché d’une voix passionnée : « J’ai voulu devenir Français ! ». Une phrase que tant de compatriotes venus d’Algérie pourront apprécier à leur juste mesure. Il est vrai que ce Manuel Valls n’a jamais eu peur, tout en assistant aux matchs du club de football du Paris Saint-Germain, d’afficher ses préférences pour les Catalans de Barcelone. Les racines de l’enfance s’expriment à l’âge adulte de manière inattendue. Peu importent la politique et les nationalités embrassées.


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